Romuald Bertrand en est encore étonné : c’est lui qui a créé la
tenue «costume national» portée par miss France pour le concours de miss Univers qui s’est tenu le 25 janvier – que Camille Cerf n’a cependant pas gagné.
«Je suis parti de zéro il y a 4 ans et j’en suis à faire une robe pour miss Univers, dans mon atelier de 13 m2. Avoir cette opportunité à 24 ans était inespéré. Des fois, je ne comprends pas tout !».
S’il est fier de sa réussite, le jeune couturier créateur de Cayenne, à côté de Besançon, reste modeste. Il explique même l’attribution de la robe aux circonstances.
«Cela fait plusieurs années que je suis partenaire de l’élection miss Franche-Comté. L’an dernier, j’ai reçu le prix du costume régional pour l’une des robes que miss Franche-Comté a porté à l’élection de miss France. Cette élection a eu lieu à Orléans et là, je suis tombé au bon moment sur la bonne personne, celle qui m’a proposé de travailler pour miss Univers».
Dis comme ça, ça a l’air simple. Mais sans le talent, les circonstances ne suffisent pas. Pour s’en convaincre, il suffit de voir les deux robes citées, dont celle du prix régional constituée à partir de pièces d’horlogerie données par l’entreprise Vuillemin.
«Il fallait que la robe rappelle d'emblée la Franche-Comté» explique-t-il. Celle pour miss France associait rouge, noir et blanc, béret, jersey et dentelle de Calais. Il l’a réalisée en 9 jours, 18 h de travail par jour (voir photos).
Mode
et spectacle
Romuald n’en n’est pas à sa première réussite même si les autres étaient plus locales. Il a été l’un des premiers jeunes à être aidé par le
Clap (1). Avec son association «Clé d’union», il a obtenu un prix
«Jeunes qui osent» du Crédit Mutuel. Des aides qui lui ont permis de mener à bien «Secret de mode», action solidaire autour de la mode, en faveur de «Semons l’espoir» (2). Non pas un défilé de mode classique mais un spectacle incluant danse, théâtre, magie
«qui ne s’adressaite pas à une clientèle réservée mais à tout public» (3).
Un grand souvenir, qu’il espère renouveler.
«C’est même mon but premier. Mettre en scène mes vêtements est ce qui me plaît le plus. Cela me permet de continuer à créer en vivant mon autre passion, celle de la scène. C’est frustrant de ne l’avoir fait qu’une fois». C’est même lui qui a conçu la partie magie,
un numéro de métamorphose "quick change" au cours duquel une coéquipière change 6 fois de tenue, à chaque fois en un trournemain. Un numéro diigne d'Arturo Brachetti, qu'il mène lui-même et dont il garde les secrets.
Le monde du spectacle lui plaît et il espère réitérer l’expérience, de manière encore plus ambitieuse,
«avant mes 30 ans». Pour ça, il aimerait se lancer rapidement dans la recherche de partenariats et de subventions car il évalue à 100 000 euros ce qu’il a en tête.
"Depuis que j'ai lancé
l'activité, je ne me suis
plus arrêté"
Mais à la base, il y a la mode. D’où lui vient cette passion ?
«C’est venu progressivement, depuis le collège. Je pense que c’était en moi avnt. En tout cas c’est quelque chose qui est plus intuitif que réfléchi. Concrètement, au collège, j’ai participé à un atelier couture et à un défilé. C'est à partir de là j’ai su ce que je voulais faire».
Il s’en est suivi un BEP et un bac pro métiers de la mode option couture flou au lycée Prévert, à Dole. Poursuivre en BTS ne l’intéressait pas car il ne voulait pas se tourner vers l’industriel.
«Je voulais continuer dans une école privée mais c’était 13 000 euros l’inscription, sans compter le coût de la vie parisienne. Et c’est tombé l’année de la crise, toutes les maisons ralentissaient ou fermaient. La période n’était pas favorable ; je n’ai pas été pris.»
Il a alors décidé de créer une autoentreprise.
«Une fois que l'activité a été lancée, je ne me suis plus arrêté».
La robe miss France ne devrait pas ralentir son activité.
«En peu de temps, beaucoup de gens m’ont découvert, confirme-t-il.
J’ai beaucoup de nouveaux amis sur les réseaux sociaux et mes vidéos youtube sont beaucoup plus vues. Cela m’aide à me faire un nom mais pas forcément une clientèle car les gens pensent qu’après ça, je ne vais pas faire des robes de tous les jours. Mais miss France n’est qu’un emblème. Ma clientèle, c’est M. et Mme Tout le monde. On peut m’appeler pour une tenue de soirée, de mariée, pour habiller un groupe de danse ou une chorale et même pour une animation. Je travaille sur mesure et sur demande».
Céation et
transmission
Et dans son travail quotidien, pas de préférence.
«Toutes les étapes me plaisent. Il y a de la création, il y a du relationnel. Imaginer est la partie la plus magique. Choisir les matières, c’est le moment où on commence à concrétiser. Et quand on fabrique, il y a l’euphorie de terminer. Enfin il y a la présentation qui est aussi une belle étape. Je prends aussi souvent des stagiaires car l’idée d’apprendre aux autres, de transmettre me plaît également. Plus ça va et plus les écoles m’appellent de loin».
Finalement, c’est hors temps de création qu’il faut chercher les quelques aspects rébarbatifs.
«Les clients qui ne paient pas, les chèques en bois, ceux qui ne viennent pas chercher leurs habits. C’est ça le plus difficile».
Stéphane Paris
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