Celui qui administre et gère le tribunal de grande instance en collaboration avec le président est peut-être plus connu pour sa fonction d’accusateur public, par laquelle il représente les intérêts de la société.
«Mais ce n’est que la partie émergée de mon action souligne Alain Saffar. En termes de temps, la mission principale
est de recevoir les plaintes et procès-verbaux et d’apprécier la suite à leur donner. Avant d’être accusateur, il y a une série d’analyses qui peut nous amener à classer l’affaire. C’est le cas si les faits portés à notre connaissance ne sont pas des infractions ou si l’on n’a pas suffisamment d’éléments pour déterminer qui est l’auteur.
Précisons qu’en cas de classement, la victime n’est pas dénuée de recours et peut aussi mettre en mouvement l’action de la justice.
Lorsqu’on reçoit une plainte, le premier travail porte sur l’existence ou non d’une infraction pénale. Si la réponse est oui, y a-t-il une personne à l’égard de laquelle on estime qu’il y a des charges suffisantes ? À partir des réponses à ces deux questions, on décide quelle suite donner. Par exemple saisir le juge d’instruction pour lui confier l’affaire.Même en cas d’infraction et de reconnaissance de l’auteur, j’ai encore le pouvoir d’opportunité des poursuites. Supposons que l’infraction soit de faible gravité, que ce soit la première commise par son auteur : je peux très bien proposer une alternative à la poursuite, à savoir rappel à la loi, médiation pénale ou encore obligation d’effectuer un stage, tel qu’un stage de sensibilisation dans le cas d’un usage simple de stupéfiants.
Finalement, le rôle d’accusateur intervient lorsque l’on estime qu’il y a des charges et des faits suffisamment graves, une personnalité suffisamment inquiétante pour que l’on porte l’affaire devant une juridiction».
Alain Saffar évalue à un peu moins de 20 000 le nombre de procédures qu’il reçoit chaque année. Environ 12 000 sont des procédures contre X, classées faute d’auteur identifié. Sur le reste, affaires pour lesquelles il y a infraction et auteur potentiel, la moitié fait l’objet de réponses pénales ou d’alternatives aux poursuites. L’autre moitié, donc environ 1/5e du total, est l’objet de poursuites. Lorsqu’il engage des poursuites, le procureur a un pouvoir d’orientation important : «je peux faire juger
quelqu’un en lui fixant une date d’audience et en le laissant libre jusqu’à ce moment, je peux aussi estimer qu’il y a un besoin d’une mesure de sûreté comme le contrôle judiciaire ou la détention provisoire jusqu’au jugement. A ce moment-là je saisis le juge qui prend la décision. Dans le cas d’un délit, je peux demander une comparution immédiate en saisissant le tribunal correctionnel. Dans le cas d’affaires graves, comme des crimes, ou complexes, demandant des investigations longues, je peux saisir un juge d’instruction – lequel n’est pas obligé de suivre une éventuelle demande de détention provisoire. De manière générale, il faut comprendre que le procureur oriente, propose, exerce son droit d’appel si ses demandes n’ont pas été suivies mais n’est pas l’autorité qui, au bout du compte, décide».
Jusqu’au moment où il saisit le juge d’instruction, c’est aussi le procureur qui dirige et contrôle les enquêtes menées par les services de police et de gendarmerie. Le procureur intervient essentiellement dans les affaires pénales mais peut être amené à le faire dans toutes les juridictions de son ressort, telles le conseil de prud’hommes, le tribunal de commerce (il intervient notamment dans les redressements et liquidations judiciaires), la chambre civile, devant lesquels il représente l’intérêt de la société. En matière civile, il a des pouvoirs de contrôle de l’activité des officiers d’Etat civil, de proposition et d’avis sur les adoptions, les rectifications administratives de l’Etat civil ou les dérogations liées à l’âge du mariage.
Il est également partie prenante des dispositifs publics de prévention et de lutte contre la délinquance, siégeant dans un certain nombre de conseils avec la Préfecture, les élus, les services de police ou l’inspection académique.
Commentaires
Afin de poster un commentaire, identifiez-vous.