Mooc : l’idée est encore récente, le premier Mooc francophone étant né en 2012. Un mot nouveau et un concept qui ne l’est peut-être pas tant que ça puisqu’il s’agit d’enseignement à distance. Mais enseignement à distance grandement facilité par internet : le sigle signifie massive open online course et se traduit par cours en ligne ouvert massivement. L’enseignement à distance existe depuis longtemps ; la nouveauté apportée par le net est la facilité d’accès. Le nombre de participants est théoriquement illimité. Il en fait également un compromis pratique entre les cours à distance à l’ancienne et les propositions des universités ouvertes.
«Les Moocs sont des formations à distance parmi d’autres précise Jérôme Bruet (en photo ci-dessus), ancien enseignant et créateur d’
e-doceo, société qui s’est lancée dans l'e-learning dès 2002.
Ce marché de l'e-learning s’est bâti avec des mots tendance comme spoc, social learning ou serious game. Parfois, cela sert juste à créer du buzz. Sur les serious games par exemple, la demande est en réalité quasi nulle».
Du côté des Moocs, curiosité et succès ont été rapidement au rendez-vous. Pouvoir assister à des cours des plus prestigieuses universités internationales est une perspective séduisante. Un constat établi dès le démarrage de la plateforme
France université numérique rassemblant les Moocs d’Universités et grandes écoles françaises : lancée en janvier 2014 avec 25 Moocs, elle a immédiatement reçu près de 90 000 inscriptions. L’Etat avait alors débloqué 20 millions pour fabriquer et développer des cours en ligne ou cofinancer des Moocs destinés à la formation professionnelle. Aujourd’hui, 51 établissements ont inscrit au moins un cours sur Fun. Perspectives souhaitées : démocratiser l’enseignement supérieur, favoriser la réussite de tous les étudiants, faciliter la formation tout au long de sa vie. Mais la simple curiosité ou la volonté de se cultiver peuvent aussi constituer une motivation facile à combler.
«France université numérique ne s’adresse pas seulement aux étudiants» insistait le gouvernement lors du lancement de la plateforme. Sur Fun, les Moocs sont gratuits, mais ce n’est pas toujours le cas.
Un Mooc pour apprendre
à monter un Mooc
Sur la page de Fun on accède aussi bien à "culture et écriture numérique" qu’à "philosophie et modes de vie" ou "comprendre la santé publique et le système de santé". Ou encore… "monter un Mooc de A à Z". 17 mots clés cernent les domaines d’intervention, de "création" à "cultures et civilisations", d’"entrepreneuriat" à "environnement". Revers du succès, un taux très élevé d’abandon. Plus de 60 % des inscrits ne vont pas au bout du cursus.
My-mooc et
mooc-francophone recensent l’ensemble des cours et des plateformes d’accès.Chaque mois, débutent 30 à 50 Moocs francophones, avec une diversité de thèmes et de durées encore plus importantes que pour l’enseignement supérieur. On peut apprendre à animer une communauté Twitter en 10 h, optimiser le rendement d’un site web en 5 semaines, aborder l’introduction à la mécanique des fluides en 6 semaines. Pour réussir le Toeic (payant) c’est 5 semaines également, pour connaître les bases de l’anglais, 8 semaines.
La France leader
Voilà presque 10 ans que Véronique Touzé étudie et travaille dans l’e-learning, au CNRS, à l’Université du Mans puis en tant que formatrice pour e-doceo. Elle confirme
«une évolution très rapide due aux technologies, mais qui englobe plus de nouveautés en termes de mots, de marketing et de matériels que de fond. Parfois, on met des mots différents sur la même réalité». Mais voilà, les apparences ont du bon :
«les évolutions technologiques, l’utilisation de smartphones ou de tablettes, sont beaucoup plus attractifs pour les gens qui vont souhaiter se former à distance. Mais il faut du fond, de la pédagogie, du transfert de compétences».
Au cours des 4 dernières années, l'e-learning au sens large a connu une progression de 24 % au niveau international et 10 à 15 % en France.
«Pour une fois, la France est un des leaders par rapport à ce que l’on peut voir en Allemagne, aux Pays-Bas, en Belgique, en Espagne ou en Suisse. Il y a un vrai savoir-faire. Beaucoup de players sont français, s’exportent. L’e-learning est un croisement de pédagogique et de technologique et on est très bon en pédagogie» affirme Jérôme Bruet.
3 vagues
de formation professionnelle
Très concernée, la formation professionnelle continue évolue elle aussi. Jérôme Bruet est bien placé pour en parler : créée sur cette orientation, sa société est aujourd’hui présente dans 12 pays et leader en France. Elle propose des formations mais aussi des modules permettant aux formateurs de créer leurs propres logiciels et un accompagnement des entreprises dans ce domaine.
«Il y a eu plusieurs vagues. La première consistait à démocratiser des outils de création de contenu interactif. Ensuite, l'e-learning a permis de proposer une formation en laissant les salariés dans l’entreprise. Et, troisième vague, le formateur n’a plus besoin d’être présent dans la salle». Possibilité encore lagement minoritaire.
«Le pourcentage de formation en présentiel se situe toujours entre 80 et 90 assure Véronique Touzé.
On ne remplacera pas la formation en face à face. La tendance est plutôt au blending, associant plusieurs types de formation. Par exemple un jour de formation en présentiel suivi de 6 h de classe virtuelle. Les deux aspects peuvent se compléter».
Autrement dit, l’e-learning faciliterait, compléterait le présentiel, sans pour autant le remplacer.
«Ce n’est pas forcément plus rentable s’il faut outiller tous les apprenants. Quant au phénomène générationnel, il n’est pas si important que ça : le digital est entré dans toutes les générations et dans toutes les générations, il y a des personnes plus ou moins attirées par les nouvelles technologies. Quel que soit le type de formation, la question à se poser reste : est-elle utile pour les collaborateurs ?».
Stéphane Paris
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