janvier 1993

Secrets d'un lac sur l'évolution du climat de la région

A partir de pollens retrouvés dans les sédiments du lac de Chaillexon, en amont du saut du Doubs, peuvent être décrites de manière précise, les variations climatiques de la région depuis 13 000 ans. Les explications de Vincent Bichet, géologue.

  • commentercommenter
  • envoyerenvoyer
  • imprimerimprimer
  • caractèrePLUSMOINS
Le saut du Doubs à Villers-le-lac s'est formé il y a 13000 ans, suite à un éboulement de la rive droite du Doubs (le côté suisse de la vallée) qui coupe le lit de la rivière. Il se constitue alors en amont de l'éboulement un lac : le lac de Chaillexon. Et depuis 13000 ans, le Doubs qui traverse le lac de part en part, y dépose des sédiments remplissant désormais le lac au neuf-dixième. « Les sédiments sont une parfaite mémoire de l'environnement et leur lecture à travers les pollens qu'ils renferment permet de rétablir la végétation existante et le climat de chaque période », indique Vincent Bichet qui prépare une thèse de doctorat en géologie sur le secteur du lac de Chaillexon. L'étude du remplissage du lac équivaut donc à lire une sorte de mémoire du climat. Il y a 13000 ans, lorsque se constitue le saut du Doubs, on est à la fin de la dernière grande période glaciaire, appelée Würm par les scientifiques. « Une grosse calotte de glace recouvre alors la haute chaîne du Jura et déborde largement sur le flanc ouest sur le flanc suisse ». Prédomine alors dans notre région un climat assez semblable à celui que l'on trouve aujourd'hui en bordure du Groenland et une végétation essentiellement steppique recouvre les sols.

Elévation des températures

De 13000 ans à nos jours (NDLR toutes les dates doivent être comprises comme partant de la période actuelle), l'évolution générale va vers une élévation des températures. « A partir de l'analyse des sédiments et des pollens qu'ils contiennent, on peut dire que cette montée des températures n'est pas constante, mais entrecoupée d'accélérations, de moments d'arrêts, voire de reculs » affirme Vincent Bichet. Il y a 13000 ans les écarts moyens de température ont pu atteindre 4 à 6° C en moins par rapport aux températures actuelles. De 13000 ans à 11000 ans le climat se réchauffe lentement et profitant de la plus grande chaleur, « des boqueteaux de bouleaux et pins envahissent les steppes. On n'a retrouvé à ce jour aucune présence humaine à cette époque dans le secteur ».
A nouveau, durant environ 1000 ans, de 11000 ans à 10000 ans, le climat se refroidit, « la végétation redevient steppique et les pluies sont particulièrement abondantes ». La période suivante appelée Préboréal s'étale sur environ un millénaire : le réchauffement climatique reprend et s'accentue. Le chêne se développe jusqu'à 800 mètres d'altitude. « A certains moments durant le Préboréal, le Doubs ne coule pratiquement plus. Les pertes du Doubs dont on parle beaucoup aujourd'hui commencent-elles à fonctionner ? », s'interroge Vincent Bichet, « cela est-il dû à un manque de pluie? Peut être à une combinaison des deux phénomènes... » Tout au long des mille années suivantes (de 9000 à 8000 ans), le climat davantage humide permet la constitution de forêts importantes et denses avec principalement le chêne, l'orme et le frêne.

Les premiers agriculteurs

De 8000 à 4700 ans, c'est la période Atlantique considérée comme l'optimum climatique durant lequel, température et humidité sont plus favorables à la végétation qu'elles ne le sont actuellement. Une végétation abondante et variée s'installe avec, en particulier, l'aulne et le chêne. C'est durant cette période qu'apparaît le sapin alors que le chêne monte jusque sur la haute chaîne du massif jurassien. « Les températures d'été sont supérieures d'environ 2°5 aux moyennes actuelles ». Des peuplements humains importants s'installent. Les échanges paraissent nombreux avec le côté suisse. « On retrouve des traces de pollen de céréales qui attestent de l'apparition des premiers agriculteurs dans la région où la déforestation est importante ». La même constatation a pu être faite sur plusieurs lacs du Jura par Hervé Richard du laboratoire de chrono-écologie de la faculté des sciences de Besançon, ce qui renforce son étendue régionale. De 4700 ans à nos jours, le climat redevient plus continental, le chêne redescend à des altitudes beaucoup plus basses. Le sapin s'installe véritablement sur les reliefs ; l'homme accentue sa présence par les défrichements et colonise le couvert végétal. « L'un des objectifs des recherches actuelles est d'étudier plus en détail les apports de sédiments depuis ce siècle. Nous devrions alors pouvoir évaluer la date du comblement du lac de Chaillexon ». Mais le saut du Doubs restera bien en place.

Joseph Doillon
Retour

Commentaires

Afin de poster un commentaire, identifiez-vous.

Se connecter S'inscrire

articles

express

Tabac et environnement


novembre 2024
Selon l’Organisation mondiale de la santé, la production annuelle de gaz à effet de serre par l’industrie du tabac s’élève à 84 mégatonnes d’équivalent dioxyde de carbone, soit 1/5e de de celle de l’industrie du transport aérien. Elle correspond au lancement de 280 000 fusées. Elle utilise également 22 milliards de tonnes d’eau. Son impact sur le changement climatique n’est donc pas négligeable. D'après l'organisme, « les produits du tabac représentent les principaux déchets sur la planète, et contiennent plus de 7000 produits chimiques toxiques, qui pénètrent dans notre environnement lorsqu’ils sont jetés. Environ 4500 milliards de filtres à cigarettes polluent océans, fleuves, trottoirs, parcs, sols et plages chaque année ». Finalement, fumer a plus d’impact négatif sur la planète que manger de la viande rouge.

Pitch your project 2024


septembre 2024
Un concours ouvert aux 16 - 29 ans destiné à renforcer l’attractivité et de développement durable de la région alpine. Il s'agit d'avoir une idée pour les Alpes et de vouloir la concrétiser et échanger avec des jeunes de toute la région alpine. Quatre thèmes sont proposés : gestion durable de l'eau, économie circulaire, participation des jeunes, mobilité. Ce concours peut être réalisé individuellement ou en groupe (projets scolaires, étudiants ou associatifs). Les candidats ayant soumis les cinq meilleurs projets pourront les présenter et les soutenir devant un public international en novembre. Les 3 premiers recevront une dotation de la Région Bourgogne-Franche-Comté de 5000, 3000 et 2000 euros. Au préalable, il faut remplir le formulaire de candidature en ligne avant le 1er octobre.

Maltraitance animale


juillet 2024
3677 : c'est le numéro national lancé par le conseil de la protection animale le 24 juin pour signaler une maltraitance contre les bêtes (négligences, violences physiques, conditions de vie dangereuses, ventes illégales...). Les appelants sont dirigés vers des structures adaptées.

Podcast "Au rythme du Haut-Jura"


mai 2024
Le Parc naturel régional du Haut-Jura lance son podcast « Au rythme du Haut-Jura ». Il propose un décryptage sonore de son territoire et ses richesses naturelles et humaines sur lesquels pèse le spectre des changements globaux tel que le réchauffement climatique. Au fil des rencontres ce podcasts analyse ces patrimoines remarquables, explique leurs enjeux et présente quelques actions mises en place pour les préserver. Pour cette première année, le Parc propose deux séries aux formats distincts : « La forêt » et « Curiosités ».  Elles sont diffusées alternativement selon un rythme d’un épisode par mois. Ce podcast est accessible sur toutes les plateformes d’écoute classiques.

Association écologique et forestière franc-comtoise


mai 2024
Cette association basée à Grandfontaine, à côté de Besançon, a pour but de préserver l’écologie et les forêts à travers des actions de sensibilisation telles que clean walks, buvettes écologiques, plantations d’arbres comme les Petits Fruitiers pour l’avenir installés en novembre 2022. aeeffc.org
Voir tout