L’an dernier, la Ville de Besançon et ses partenaires ont organisé 6 soirées gratuites sans alcool, histoire de montrer aux jeunes qu’on peut faire la fête sans boire. Une réaction poussée à l’alcoolisation excessive des jeunes en soirée et notamment des étudiants le jeudi. Trop poussée ? En 2015, le curseur est replacé : le slogan choisi cette année indique «moins d’alcool, c’est plus cool». Objectif modération.
«L’idée est d’avoir une politique d’accompagnement de la fête étudiante plutôt que d’être réprobateur ou de stigmatiser, ce qui serait de toute façon contre-productif. Il ne s'agit pas de prohiber l’alcool. En soirée, on peut quand même boire une bière. Ce sont les comportements extrêmes qui posent problème» résume Thierry Grandmottet, directeur de la mission Tranquillité publique de la Ville de Besançon. Cette politique reprend les dispositifs ayant eu cours l’an dernier : organisation de soirées alternatives et de soirées réduction des risques, mobilisation de personnel spécifique les jeudis soirs, charte de la vie nocturne, signée en octobre dernier. Signe d’une adhésion amplifiée, des associations étudiantes comme la Baf ou ESN adhèrent au projet. «Pour notre action de sensibilisation aux risques, nous passons aussi désormais par des étudiants que nous formons ajoute Lilian Babé directeur adjoint de Soléa. L’information par les pairs fonctionne bien mieux».
Problème étudiant
Par les pairs, car toutes ces décisions découlent de ce phénomène ayant émergé il y a une dizaine d’années dans les villes étudiantes, dont Besançon : des retrouvailles dans la rue le jeudi soir avec un programme très chargé en alcool et des modes type binge drinking ou alcool + Red Bull. Les étudiants sont très majoritaires, même si l’on note la présence de lycéens et d’autres types de public. «Attention, ce n’est pas nouveau tempère Lilan Babé. Les jeunes d’aujourd’hui ne consomment pas plus mais consomment différemment. Toutes les générations d’étudiants ont consommé de l’alcool. La consommation massive existait dans les bals de campagne et même dans l’Antiquité. C’est aussi une forme de rituel ; se confronter au risque sert à se mesurer, à se construire.»
Les participants au réseau s’étoffent à mesure que le dispositif prend forme. Il a été expérimenté en 2012, mis vraiment en place en 2013, pris de l’ampleur en 2014, avec l’organisation des soirées festives gratuites.
«Nous sommes montés en puissance assure Thierry Grandmottet. La première soirée alternative à la Rodia était mitigée mais les deux suivantes à la Malcombe et à la patinoire ont cartonné». Les jeudis soirs mobilisent une vingtaine de personnes en ville en plus des services de police et de SOS médecins, présent au commissariat pour constater les cas d’ivresse publique manifeste. «Nous tirons toutes les ficelles explique Thierry Grandmottet : la sensibilisation, le préventif, le répressif».
Intérêts contradictoires
Le sujet est sensible car il implique du monde et des intérêts contradictoires, entre lesquels il faut trouver un juste milieu satisfaisant pour tous : les jeunes, les bars, les riverains, les vendeurs d’alcool, les élus et responsables de la sécurité publique, les forces de l’ordre. «Parfois, on a pu avoir jusqu’à 700 personnes place du 8 septembre. On «marche sur des œufs» tous les jeudis» situe Thierry Grandmottet. Plusieurs services de la Ville sont d’ailleurs concernés : Tranquillité mais aussi Hygiène santé, Sécurité, Jeunesse, Vie étudiante.
«Je pense que la réponse bisontine est plutôt bonne dit Lilian Babé. Certains villes ont pris des mesures radicales de type CRS et canons à eau. Elles en sont revenues. Mais il faut noter que les pouvoirs publics, l’ARS ont pris la mesure du problème» note Lilian Babé. «Quelques années en arrière, ce n’était pas forcément le cas».
«Nous multiplions les initiatives pour faire évoluer les comportements, mais on ne s’attend pas à des effets immédiats, complète Nell Aturugiri, chargée de mission Tranquillité publique. Cela demandera du temps».
Stéphane Paris
Commentaires
Afin de poster un commentaire, identifiez-vous.