Au milieu de la forêt de Chaux, à l’amont de la Vieille Loye, la Clauge serpente à nouveau. Le résultat de travaux menés depuis 2004 et notamment entre 2021 et 2023 avec l’Office national des forêts en maître d’œuvre.
L’eau fait partie des axes de la politique environnementale de l’ONF. Les zones humides en forêts sont nombreuses et constitutives de la biodiversité à laquelle les forestiers sont attentifs. Depuis 10 ans, l’organisme développe des accords de coopération avec les agences de l’eau. Avec le syndicat mixte Doubs-Loue en comaîtrise d’ouvrage, l’ONF a reméandré, resserré, rehaussé le lit d’une rivière qui était devenu intermittent à la suite de son artificialisation.
« C’est le seul projet initié et opéré par l’ONF de cette ampleur en France indique Henri-Pierre Savier, chef de projet référent territorial eau de l’organisme. On a été convaincu de cette restauration par l’Université de Franche-Comté, notamment Eric Lucot et François Degiorgi, repectivement pédologue et hyrologue. La Clauge et ses affluents avaient été drainés entre 1948 et 1963. C’était un contexte de relance économique agricole et forestière ; il fallait alors reboiser tout ce qu’on pouvait ». Ces travaux étaient destinés à faciliter les interventions en forêt et en aval, à favoriser la culture des céréales.
« Il faut dire que cela avait été bien fait. Le drainage a atteint son objectif et le niveau d’eau permanent est bien descendu ». Aujourd'hui, on se rend compte que c'était une erreur. La rivière, sa nappe, ses affluents se sont petit à petit détériorés. Face à l’assèchement de nombreux affluents de la Clauge, des premiers travaux ont eu lieu entre 2004 et 2009 dans le cadre du programme européen Life. « On a testé des méthodes pour renaturer et restaurer les milieux, en expérimentant. A l’époque, on ne parlait pas autant que maintenant du réchauffement climatique. Il s’agissait surtout de préservation des espèces, sur un site Natura 2000. Entre 1973 et 2006, on a perdu 15 espèces d’insectes. Or les microinvertébrés sont la base de la chaîne alimentaire. En parallèle, on a modifié la desserte pour éviter de rouler dans les cours d’eau et de les abîmer ».
Les conséquences des travaux d’après-guerre sont un phénomène classique fréquent : la rivière s’est incisée, le niveau de la nappe phréatique est descendu. « Et donc l’étiage arrive plus vite et le cours d’eau s’assèche plus vite ». Pour réparer, 2 phases de travaux ont eu lieu : restauration de 45 km d’affluents entre 2014 et 2019, avec la participation de la Région puis 15 km de la Clauge entre 2021 et 2023, financés à 70 % par l’Agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse. La
rivière a été reméandré, avec installation de banquettes végétalisées (aulnes et joncs), d’embâcles semi-enterrés, de recharges en galets et graviers, de bouchons pour ralentir le débit sans le bloquer. « On a tout fait pour ne pas amener de matériaux exogènes, en se servant dans les talus » assure HenriPierre Savier. Pour inciter l’eau à reprendre son ancien cours, il a fallu également créer des lits guides et combler le lit rectifié.
« Un cours d’eau n’est pas que de l’eau explique-t-il. C’est aussi des matériaux qui sont emportés. Alors on fait de la recharge sédimentaire pour que le cours d’eau retrouve un cycle en période de crue. L’idée principale de ces dispositifs est de ralentir le flux et remonter le niveau du lit et celui de la nappe. Ensuite, le cours d’eau travaille tout seul pour arriver à son profil d’équilibre. Il y arrive d’autant plus vite qu’il y a de crues ».
La dernière phase des travaux a coûté 837 000 euros, mais il n’est pas certain que l’on retrouve ce qui a été perdu.
Stéphane Paeis
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