Coralie a été l’une des premières étudiantes relais à participer au dispositif Etu’bien, lancé l’an dernier à Dijon. L’idée basée sur le principe du « pair à pair » lui semble très utile. « Il est plus facile pour nous de parler à des étudiants car on sait ce qu’ils vivent. Inversement, dans un premier temps, c’est plus facile de confier ses problèmes à un autre étudiant qu’à un professionnel ». La proximité de statut et d’âge est une ligne directrice de cette démarche d’aide, qu’elle soit psychologique, sociale ou liée au parcours universitaire. Rudy a rejoint l’équipe de 13 étudiants relais lors de cette rentrée. Il confirme en connaissance de cause : « A un moment de mes études, je me suis réorienté. Comme je n’avais jamais entendu parler du pôle formation et vie universitaire, cela aurait pu m’être utile de discuter avec des étudiants qui ont connu des soucis de réorientation. C’est plus simple de parler quand on partage les mêmes préoccupations ».
Besoin de faire le point ?
Il est donc question d’aider les étudiants dans tous les domaines comme le formule le site web : « Marre d’avoir la boule au ventre ? Trop de trucs dans la tête ? Besoin de faire le point ? » Toute question est abordable : galère financière, problème de logement, mais aussi recherche d’interlocuteurs pour parler anglais ou quête de cours après une absence…
Etu’bien a été lancé par la Maison des ados 21, en accord avec l’Université de Bourgogne. Ce genre de dispositifs est rare en France et unique dans la région. « J’avais rencontré les responsables du dispositif Rescue à Strasbourg, mais ce dernier est adossé au service de santé universitaire, relate Karyn Alapetite, psychologue coordinatrice d’Etu’bien. L’idée est partie d’une réflexion que nous avons à la Maison des ados : depuis longtemps, on se questionne sur notre difficulté à toucher les 18 – 25 ans ».
La pandémie Covid a accentué autant que mis en lumière les difficultés psychologiques de cette tranche d’âge et des étudiants en particulier. S’ils ne sont pas les seuls à ressentir à ressentir du mal-être, il existe des spécificités liées à l’absence de revenus et donc à la précarité, au stress des études, à l’éloignement de la famille. « Quand on devient étudiant, on arrive avec de l’enthousiasme et de l’envie, mais on peut être rapidement confronté à des difficultés susceptibles de mettre un frein à la réussite, développe Karyn Alapetite. En travaillant sur notre petite idée, fin 2021, nous avons répondu à un appel à projets de la CPAM et nous avons eu un budget pour tester le dispositif en 2022. Nous avons commencé avec 10 étudiants. En 2023, l’agence régionale de santé nous finance en nous permettant d’étoffer l’action avec 13 étudiants relais issus de divers lieux d’enseignement supérieur, l’Université mais aussi l’IRTESS, BSB, l’école des Beaux-Arts, le centre universitaire catholique de Bourgogne (CUCDB), l’IFMKD ».
Aller vers
Ces relais permettent d’avoir une couverture de l’ensemble des lieux étudiants dijonnais. Car si Etu’bien propose des permanences les mardis et jeudis à la maison de l’étudiant, sur le campus, l’un des principes de base est « d’aller vers ». « C’est ce qui marche estime Karyn Alapetite. Pour cela, nous proposons aux étudiants relais des petites formations et des rencontres avec des professionnels pour leur permettre de travailler sur le repérage, la posture, la prise de contact ou encore de connaître les organismes susceptibles de venir en aide en fonction des problèmes rencontrés. Certains étudiants ont été formés aux premiers secours en santé mentale. »
Pour Coralie et Rudy, la démarche est en lien avec leurs propres études. « Je suis en formation kiné détaille Coralie. C’est un métier qui implique un fort lien d’aide et d’écoute des patients ». En sociologie, Rudy voit lui aussi un lien. « Dans notre cursus, on fait des enquêtes, on va vers les gens, on doit trouver les mots alors c’est assez complémentaire. Mais avec Etu’bien, ce n’est pas normatif. C’est de la proposition, pas de l’imposition ».
Dans leur contrat de job étudiant, figurent également des heures de com’ pour faire connaître le dispositif. Elle passe par le collage d’affiche, des présentations en amphi, des présences sur certains événements, l’utilisation des réseaux sociaux. « On est assez libres apprécient les deux étudiants. Il y a de la flexibilité dans les horaires, on a des responsabilités mais pas de pression ». Etu’bien leur est utile à titre personnel. Tous deux se disent réservés de nature, trait de caractère qu’ils ont pu dépasser grâce à leur rôle. « Devoir aller vers les autres est un vrai plus pour moi, dit Rudy. J’espère devenir professeur des écoles et je pense que ce n’est pas seulement apprendre aux élèves mais aussi les comprendre, être à l’écoute. Il y a ce côté qui me plaît bien dans cette mission ».
« Par rapport à ma timidité, je me suis beaucoup surprise assure Coralie. Et à côté de ça, j’ai découvert des outils de communication numérique dont Instagram ! »
En une année universitaire et demie, Etu’bien a montré son utilité. En septembre et octobre, le dispositif a répondu à 68 demandes individuelles. « Nous avons des questions qui ne viennent pas seulement d’étudiants en première année indique Karyn Alapetite. Et nous avons eu quelques cas graves pour lesquels moi ou d’autres professionnels prenons le relais : phobie scolaire, sentiment de solitude, idées noires, voire suicidaires ».
S.P.
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