juillet 2023

L’Ognon sous surveillance

A quoi sert une « pêche électrique » ? A inventorier les poissons. C’est surtout l’un des moyens d’évaluer l’état d’un cours d’eau.
Photo Laurent Cheviet
L’Ognon sous surveillance L’Ognon sous surveillance L’Ognon sous surveillance

  • commentercommenter
  • envoyerenvoyer
  • imprimerimprimer
  • caractèrePLUSMOINS
Un générateur, une cathode et une anode séparées de quelques dizaines de mètres dans un cours d’eau et des opérateurs qui effectuent plusieurs passages dans l’eau « électrifiée » pour récupérer les poissons étourdis. Abusivement appelée « pêche électrique », cette méthode permet de compter, mesurer, peser les poissons en dénombrant les espèces présentes. « On essaie aussi de déterminer leur âge » indique l'un des techniciens à l’atelier de biométrie installé sur la berge.
L’été dernier, le syndicat mixte d'aménagement de la moyenne et basse vallée de l’Ognon a mené 48 opérations de ce genre sur les affluents de l’Ognon. A Buthiers, la Buthiers (rivière et commune ont le même nom), est un petit cours d’eau qui serpente en sous-bois. C’est là que l’équipe avait choisi d’effectuer ce qu’il faut appeler « inventaire piscicole ».  « L’expression pêche électrique peut susciter l’incompréhension précise Benoït André, responsable du projet. Ça paraît violent, mais l’électricité sert simplement à assommer les poissons pour les repérer et les attraper plus facilement. On ne les tue pas. On les relâche quelques minutes après. Pour avoir une vision complète du peuplement, il n’y a pas de meilleur moyen, car chaque espèce a son propre comportement ». Ce jour de septembre 2022, en 3 passages, l’équipe récupère 207 individus. Des chabots, des truites, des gardons, des goujons, des perches, des chevesnes, une écrevisse américaine. « Ce sont plus ou moins les espèces attendues, même si l’écrevisse américaine n’a pas sa place ici. Elle a été introduite et maintenant on en trouve partout dans la vallée. Elle fait régresser « notre » écrevisse à pattes blanches qui est plus fragile ».

La situation empire

Quelques mois plus tard vient le temps de l’analyse et du bilan, en comparant avec les études antécédentes – quand il y en a. « En ce qui concerne les poissons, on est loin de l’optimale et de la situation attendue car on a peu retrouvé de truites, espèce emblématique des petits affluents de l’Ognon. Même chose pour 3 autres espèces qu’on s’attendait à trouver, le chabot, le vairon – quasi inexistant – et la lamproie. Par rapport à une étude de 2011, la situation est stable pour la truite mais a empiré pour le chabot. Globalement, la situation est pire ». Explication du chef de projet : « Les raisons sont souvent les mêmes. On a une rivière qui a subi des altérations dues à l’homme. Certaines datent d’il y a 150 ans, mais d’autres comme celles qui sont liées à la ligne LGV sont plus récentes. Chaque petit aménagement a un impact. Alors certes, il y a la pollution mais le problème est surtout morphologique. La rivière a été curée, son tracé modifié ce qui a provoqué une forte incision, avec un niveau parfois à 2 m en dessous de la normale, et une modification de l’habitat des poissons. La truite perd des abris, des secteurs de frai. Il peut y avoir des km où elle ne peut plus se reproduire. Dans la basse vallée de l’Ognon, il n’y a quasiment plus de truite. La température joue aussi beaucoup. On a un réseau de sondes pour mesurer et même si ça ne fait pas longtemps, on sait qu’on a dépassé le seuil où la rivière se sent bien ».

Paramètres multiples


A ces deux paramètres (poissons et température) s’ajouteront les invertébrés, les algues et l’analyse de la qualité de l’eau pour avoir une étude complète de l’Ognon, « pas trop étudié par rapport au Doubs et à la Loue ». L’objectif, à partir de cet état des lieux, est de planifier la suite pour le prochain contrat de rivière. « Ce sera une aide à la décision pour voir ce qu’on va faire affluent par affluent. Par exemple restaurer les méandres, supprimer des barrages, réaliser des passes à poissons ».
Sur les 215 km de l’Ognon, la situation est très différente selon les secteurs. En fonction des invertébrés présents, les cours d’eau sont crédités d’une note sur 20 (20 étant la situation normale). « Là, on est à 12. Et un peu en amont, c’est 9. Les premiers affluents de l’Ognon vers Servance et Villersexel sont par secteur en très bon état, avec des notes de 19/20 depuis 20 ans. Au contraire, sur les ruisseaux de la basse vallée, on est parfois à 6 sur 20 ». De nombreux éléments ont un impact sur l’eau, ce qui explique des différences au fil de la rivière. « Vers Lure, il y a des problèmes liés aux exploitations de charbons, de fer, à l’industrie. A l’échelle de toute la vallée, il y a des stations d’épuration qui dysfonctionnent ; et il y a aussi le problème des hydrocarbures. Plus on descend, plus c’est l’activité agricole qui a un impact. Mais attention, la démarche d’après-guerre de modifier les rivières pour gagner en productivité était collective. On n’est pas du tout en conflit avec les agriculteurs et on en rencontre beaucoup qui veulent protéger le milieu. Notre démarche n’est pas juste de protéger les petites bêtes. Derrière, c’est la ressource en eau que l’on essaie de préserver ».

S.P.
En savoir +
riviereognon.fr

En photo
Pêche électrique et inventaire piscicole, Buthiers, septembre 2022.

Retour

Commentaires

Afin de poster un commentaire, identifiez-vous.

Se connecter S'inscrire

articles

express

Tabac et environnement


novembre 2024
Selon l’Organisation mondiale de la santé, la production annuelle de gaz à effet de serre par l’industrie du tabac s’élève à 84 mégatonnes d’équivalent dioxyde de carbone, soit 1/5e de de celle de l’industrie du transport aérien. Elle correspond au lancement de 280 000 fusées. Elle utilise également 22 milliards de tonnes d’eau. Son impact sur le changement climatique n’est donc pas négligeable. D'après l'organisme, « les produits du tabac représentent les principaux déchets sur la planète, et contiennent plus de 7000 produits chimiques toxiques, qui pénètrent dans notre environnement lorsqu’ils sont jetés. Environ 4500 milliards de filtres à cigarettes polluent océans, fleuves, trottoirs, parcs, sols et plages chaque année ». Finalement, fumer a plus d’impact négatif sur la planète que manger de la viande rouge.

Pitch your project 2024


septembre 2024
Un concours ouvert aux 16 - 29 ans destiné à renforcer l’attractivité et de développement durable de la région alpine. Il s'agit d'avoir une idée pour les Alpes et de vouloir la concrétiser et échanger avec des jeunes de toute la région alpine. Quatre thèmes sont proposés : gestion durable de l'eau, économie circulaire, participation des jeunes, mobilité. Ce concours peut être réalisé individuellement ou en groupe (projets scolaires, étudiants ou associatifs). Les candidats ayant soumis les cinq meilleurs projets pourront les présenter et les soutenir devant un public international en novembre. Les 3 premiers recevront une dotation de la Région Bourgogne-Franche-Comté de 5000, 3000 et 2000 euros. Au préalable, il faut remplir le formulaire de candidature en ligne avant le 1er octobre.

Maltraitance animale


juillet 2024
3677 : c'est le numéro national lancé par le conseil de la protection animale le 24 juin pour signaler une maltraitance contre les bêtes (négligences, violences physiques, conditions de vie dangereuses, ventes illégales...). Les appelants sont dirigés vers des structures adaptées.

Podcast "Au rythme du Haut-Jura"


mai 2024
Le Parc naturel régional du Haut-Jura lance son podcast « Au rythme du Haut-Jura ». Il propose un décryptage sonore de son territoire et ses richesses naturelles et humaines sur lesquels pèse le spectre des changements globaux tel que le réchauffement climatique. Au fil des rencontres ce podcasts analyse ces patrimoines remarquables, explique leurs enjeux et présente quelques actions mises en place pour les préserver. Pour cette première année, le Parc propose deux séries aux formats distincts : « La forêt » et « Curiosités ».  Elles sont diffusées alternativement selon un rythme d’un épisode par mois. Ce podcast est accessible sur toutes les plateformes d’écoute classiques.

Association écologique et forestière franc-comtoise


mai 2024
Cette association basée à Grandfontaine, à côté de Besançon, a pour but de préserver l’écologie et les forêts à travers des actions de sensibilisation telles que clean walks, buvettes écologiques, plantations d’arbres comme les Petits Fruitiers pour l’avenir installés en novembre 2022. aeeffc.org
Voir tout