novembre 2019

Les déchets questionnent notre mode de vie

Aller vers zéro déchet est une démarche à la fois écologique et économique. Facile à adopter selon les adhérents de Zero waste France.
Photo Laurent Cheviet

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Zéro déchet, utopie ? L’idée est difficilement réalisable comme le reconnaissent les membres de Zéro déchet Besançon. « C’est plutôt un horizon vers lequel tendre indique Jérôme Scherer, l’un des responsables de l’association. Mais « zéro », c’est aussi pour interpeller et marquer les esprits ». Il y a urgence comme pour tout ce qui concerne les thèmes liés à l’environnement, à la pollution, au réchauffement climatique.
« Le mouvement s’appelle Zero waste, précise Alix, qui a lancé un collectif Zéro déchet dans le Jura avant l’été. Ce qui signifie plutôt gâchis que déchet ». Zéro gâchis, ce serait déjà un grand pas et un premier objectif accessible même aux moins motivés. L’Ademe vient de montrer à l’aide d’une expérience menée avec 250 foyers qu’on réduit 60 % de gaspillage alimentaire en quelques gestes simples. Ce chiffre rejoint celui du Giec, groupement d’experts sur le climat : « mondialement, 25 à 30 % de la nourriture produite est gaspillée ou perdue ». L’Agence conclut : « la clé de la chasse au gaspi réside dans la prise de conscience ».
« C’est simplement une question de sens lance Nicolas, un jeune membre de Zéro déchet Jura. Au départ, je ne me suis pas dit je vais sauver la planète ; ça, c’est stressant ! Mais comme j’ai toujours bricolé, recyclé, voir partout des trucs en plastique m’interroge. En fait, c’est le système D qui m’a rendu écolo et pas l’inverse ». Actuellement, il sort une poubelle toutes les deux semaines.
De son côté, Jérôme Scherer assure être pratiquement parvenu à l’objectif zéro déchet.  Mais il reconnaît que c’est moins facile pour une famille. Néanmoins, c’est possible : c’est d’une famille qu’est venue la preuve qu’il ne s’agit pas uniquement d’une utopie. L’expérience et les pratiques de la famille surnommée « Zéro déchet » ont eu droit à plus de 2 millions de visites sur son blog. Chacun peut y piocher tout ou partie de ses astuces, conseils, recettes. « Les premiers gestes ne sont vraiment pas compliqués souligne Sarah El Hamadani, autre responsable du groupe bisontin. Evidemment, plus on va vers zéro, plus c’est difficile ».

Emballages peu emballants

Outre le gaspillage alimentaire, les emballages constituent un autre grand sujet de préoccupation. Les minimiser implique d’aller faire ses courses avec ses propres emballages, réutilisables, en privilégiant le vrac. Ce n’est pas un si grand changement : il n'est effectif que pour l’aller car de toute façon on revient avec des emballages. Certes, cela demande plus de temps. « Mais si on sait s’organiser, on en gagne ailleurs assure Jérôme Scherer. Par exemple, je ne descends presque plus les poubelles » rit-il.
Symboliquement, la démarche s’appuie sur 4 r : refuser (« ce qui n’est pas utile, genre goodies »), réduire, réutiliser, recycler. Un 5e constitue à composter (rot en anglais). A partir de là découlent d’autres comportements comme « faire soi-même ». On pourrait s’interroger : réutiliser d’accord, mais pourquoi fabriquer soi-même ? Dans le cas d’objets, il s’agit bien de réutiliser pour éviter de jeter. Mais faire son produit lessive ? Cela relève d’un état d’esprit général. Moins jeter, c’est moins consommer. C’est aussi réfléchir à chaque geste, en particulier à chaque geste d’achat. Dans une perspective aquoiboniste, fabriquer son liquide-vaisselle, adopter le bokashi (technique de compostage japonaise pratique en appartement), utiliser des vieilles chaussettes pour faire des éponges relèvent de petits gestes. Ils ne le sont plus s’ils sont multipliés par des millions voire des milliards.

Entre le souci de la planète et celui du dernier i-phone

« Zéro déchet, c’est aussi renouer avec des gestes qui ne sont pas si anciens remarque Alix. On voit des gens aller au marché avec leur cabas... Voire leur bidon de lait ». « Le sac à pain, le cabas… On n’invente rien, on refait ce qui se faisait avant note Jérôme Scherer. Mais on n’est pas obligé de fabriquer soi-même. Moi je préfère donner de l’argent aux artisans et militer pour le tout en vrac ».
Si l’argument principal est écologique, toutes ces démarches de moins acheter, moins jeter, faire soi-même représentent aussi des économies. « Ne plus acheter de bouteille d’eau en plastique est à la fois économique et écologique ». « Aujourd’hui, à part quelques bornés, plus personne ne veut polluer espère Nicolas. J’ai l’impression que ceux qui le font s’en veulent ».
Plus problématiques sont les habitudes de consommation. Elles ne sont pas évidentes à changer, même si l’idée de consommer sans limite n’est une recommandation (« il faut de la croissance et du PIB ») vieille que de quelques décennies. « On sent les jeunes très sensibilisés estime Alix. Mais ils sont pris entre le souci de la planète et l’idée d’avoir le dernier i-phone ou le dernier habit ».
« A un certain stade, on ne peut plus faire baisser ses déchets sans changer de mode de vie complète Clarence, autre jeune adhérent de Zéro déchet Jura. On ne peut pas faire zéro déchet avec le mode de vie actuel. C’est lui qui est en question ».

S.P.
En photo
Atelier couture du groupe Zéro déchet Besançon.

En savoir plus
Réductions des déchets
fne.asso.fr
zerowastefrance.org
ademe.fr
zero-gachis-academie.fr
famillezerodechet.com

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