Installé à même le sol de la salle événementielle d’Auxonne, devant les 3e du collège La Croix des Sarrasins, le décor est minimaliste : des caisses noires et un cadre d’or, au centre. Seul sur scène : le comédien Philippe Coulon. En trente minutes, il campera tantôt un narrateur, tantôt un jeune engagé dans le groupuscule franquiste de la Phallange, tantôt Federico Garcia Lorca, personnage éponyme de la pièce. Dans le cadre doré, des jeux d’ombres emmènent les jeunes spectateurs à Grenade, ou New York, lieux de passage de l’auteur espagnol.
Cette création de la compagnie doloise Le Nez en l’air est une adaptation de la courte biographie du dramaturge républicain, fusillé à l’âge de 38 ans, parue dans la collection «Ceux qui ont dit non» (Actes Sud junior). Dans une forme similaire, le metteur en scène Alexandre Picard a donné vie à une autre «figure insoumise» célèbre, Simone Veil, interprétée par la comédienne Mylène Buffavand. Le premier a dit non au franquisme, la seconde aux avortements clandestins ; deux sujets que les comédiens du Nez en l’air abordent depuis presque deux ans dans les collèges et lycées de la région.
«Pour une fois qu’on nous demandait notre avis !»
À Auxonne, les élèves de 3e B sont allés plus loin : avant de voir la pièce, ils ont étudié la biographie de Federico Garcia Lorca, et ont rencontré l’auteur, Bruno Doucey. Puis, dans le cadre du projet Parcours Starter (1), ils ont écrit chacun un texte, pour dire non. Non à l’homophobie, pour William, aux briseurs de rêves, pour Elina, à la violence gratuite, pour Mathis, ou encore au malheur des enfants, pour Maëva. «Ces textes nous ont permis de faire passer des messages, souligne Emilie, pour une fois qu’on nous demandait notre avis !».
«Nous voulions leur montrer qu’ils avaient le droit de s’insurger», confirme leur professeur de français, Karine Zaragoza. Le comédien Philippe Coulon les a ensuite aidés à mettre en voix leurs textes, qu’ils ont présentés lors des journées portes ouvertes du collège à leurs parents. «Beaucoup de monde a pleuré», assurent les élèves.
Devant la pièce du Nez en l’air, venue mettre un point final à leur projet, les réactions et les questions fusent. «Pourquoi ce décor ?», «Comment avez-vous fait les jeux d’ombres ?», «Est-ce difficile de rester concentré ?». «Le changement de personnages est impressionnant, remarque William, mais ce n’est pas brouillon !». Certains ont reconnu des passages du livre et la pièce leur a même permis de mieux comprendre le franquisme. «J’ai choisi ce personnage car j’ai trouvé qu’il avait des résonances avec l’époque actuelle, leur a confié Philippe Coulon, j’espère que vous les verrez aussi.»
La compagnie Le Nez en l’air présentera de nouveau ses Figures insoumises dès la rentrée scolaire.
Camille Jourdan
Commentaires
Afin de poster un commentaire, identifiez-vous.