mars 1998

L'humanitaire demande compétences, expérience et motivation

Travailler pour une ONG ou une association humanitaire n'est pas facile, même en bénévolat !

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La bonne volonté est nécessaire, mais loin d'être.suffisante. Les ONG (organisations non gouvernementales) ou ASI (associations de solidarité internationale) le disent en choeur :.pour apporter sa pierre à l'édifice de la solidarité, il faut aussi des diplômes et de l'expérience. Et bien sûr, une motivation à toute épreuve. Un discours renforcé par la sélection, permise par le nombre de jeunes souhaitant se lancer dans le volontariat : actuellement 10 % des candidatures de volontaires sont satisfaites, dont 80 % sont des gens ayant une formation supérieure et 66 % des hommes. A Equilibre, association basée à Villeurbanne, près de 300 demandes arrivent chaque semaine, alors que 12 «expatriés» seulement partent tous les 3 mois. Un chiffre dans la moyenne française qui s'explique par les critères de sélection, énumérés par un responsable : « On essaye de vraiment savoir ce que les jeunes souhaitent faire et on prend déjà ceux qui ont une formation. On ne cherche pas d'idéalistes ou de rêveurs mais des vrais professionnels. Pour postuler, il faut au minimum parler anglais, avoir le permis de conduire et plus de 23 ans. La différence, pour ceux qui sont sélectionnés, se fait ensuite sur le parcours : compétences, voyages déjà effectués, expériences de projets. »
Quelles que soient les associations, le discours est semblable. Les compétences les plus recherchées sont celles des secteurs de la santé, de l'agriculture, du bâtiment, du social. L'Association française des volontaires du progrès, l'une des plus importantes dans le domaine, demande même d'abord des techniciens de niveau bac + 3 ou 4, des ingénieurs. Cet organisme reçoit 4000 demandes chaque année : 1500 environ correspondent aux critères de recrutement et parmi eux, 250 personnes partent pour 24 mois tous les ans après une sélection sur dossier puis une journée d'entretiens où le candidat rencontre des psychologues et des spécialistes du développement et enfin un stage de préparation au départ de 8 jours. « Nos critères sont le type de motivation, le militantisme associatif dont fait preuve le candidat, l'état d'équilibre, l'aptitude à travailler en équipe, cadre Sylvette Petit, responsable d'information de l'AFVP. sur place. Les volontaires doivent être capables de s'insérer dans des équipes avec des nationaux aux qualifications identiques.»

Peu d'abandons chez ceux qui partent

En résumé, il faut des compétences, des diplômes, des expériences, de la motivation, des qualités humaines ! Plus elles sont complètes, du genre infirmière s'y connaissant en mécanique et mieux c'est. Il va sans dire que les discours correspondant à une volonté de parcourir le monde, à « j'en ai marre de vivre dans cette société » ou aux grandes idées visant à changer le monde ne sont pas les plus convaincants. Attention à ne pas paraître nombriliste en voulant se montrer altruiste. « Chez ceux qui partent finalement, note Sylvette Petit, les difficultés psychologiques sur place restent tout à fait exceptionnelles. Les volontaires qui ne s'adaptent pas ne sont pas nombreux, 4 à 5 par an tout au plus et c'est toutjours dès les premières semaines. II y a quelques démissions pour raisons personnelles, des maladies ou des accidents ou pour certains qui trouvent du travail ailleurs, mais ce n'est pas le plus grand nombre. D'ailleurs, on remarque actuellement que de plus en plus de jeunes qui postulent connaissent déjà l'étranger, ont déjà eu des expériences moins longues, par exemple lors de chantiers de jeunes ou en stage ».

Se constituer des petites expériences

Peut-être moins exotique ou glorieux, ce type de vécu permet de se forger des expériences utiles et crédibles sur un CV. Militer dans les associations locales de solidarité, les aider lors de manifestations ets une autre idée. Enfin monter soi-même son projet en cherchant des aides de type Défi-jeunes est peut-être plus difficile mais encore plus probant. Un autre accès au domaine du volontariat est possible par des organismes qui proposent des sessions d'information et de formation comme «Jeunesse et reconstruction». Depuis 50 ans, cette association à but non lucratif propose un programme accessible aux jeunes suivant deux types de formules : des périodes courtes en France et à l'étranger, de type chantiers de bénévoles, que suivent 2500 à 3000 jeunes Français chaque année et des périodes plus longues de véritables volontariat à l'étranger qui permet à plus d'une soixantaine de jeunes de se forger une première expérience. « Ce n'est pas de l'humanitaire au sens propre du terme explique Laurence Duprez, responsable de la communication de l'association. Même si les jeunes qui se rendent à l'étranger font un travail utile, de terrain, il n'y a pas la notion de détresse que sous-entend l'humanitaire. Notre public est souvent inexpérimenté, il part aussi pour apprendre à s'adapter, connaître d'autres moeurs, une autre langue ». Grâce à ces programmes, les jeunes qui ont envie de se lancer dans l'humanitaire ont néanmoins un premir aperçu des difficultés, des notions à intégrer, de la motivation nécessaire à vouloir aider autrui. Avant de partir, l'association n'organise pas de sélection particulière, mais une semaine d'information pour faire le point et réellement savoir si l'on est partant : « Même si nous les aidons à trouver des contacts sur place, les jeunes vont partir seuls, loin et longtemps, ils doivent bien comprendre ce que cela signifie en terme de dynamisme et d'ouverture d'esprit » indique Laurence Duprez avant d'ajouter cette phrase récurrente : « Car la bonne volonté ne suffit pas.»

Stéphane Paris
En photo
Les jeunes de l'association Voir c'est vivre, à Morez, ont acheminé et distribué 5000 paires de lunettes en Jamaïque, l'été dernier. Un "micro-projet" aidé par Défi-jeunes.

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