"Il y a dix ans, la politique culturelle était plus ouverte, pluraliste. Grâce à Jack Lang, les services culturels s’intéressaient à toutes les nouvelles mouvances” se souvient Gilles Rondot. Administrateur de la compagnie hip-hop Accrorap, il est de l’aventure depuis le début ou presque et a le sentiment que les choses seraient plus dures aujourd’hui. “L’émergence de la danse contemporaine dans les années 80 a connu les mêmes difficultés. Avec le recul, je me dis que ce mouvement a obtenu sa reconnaissance assez vite”. Bien sûr il a fallu se faire connaître, tisser des réseaux mais en face les oreilles étaient attentives. “La compagnie s’est très vite structurée”. Les membres fondateurs du collectif créé en 1993 à Saint Priest (banlieue lyonnaise) ont rapidement pris leur envol. Mourad Mersouki fonde la compagnie Käfig dès 1996 (Lyon), Eric Mezino créé la Cie E’go en 2000. La même année, Kader Attou devient donc le chorégraphe et directeur artistique d’Accrorap qui s’installe administrativement à Besançon “pour ne pas concurrencer Käfig et avoir deux compagnies de hip-hop à Lyon”.
Aujourd’hui, une dizaine de compagnies professionnelles de hip-hop est recensée en France mais “seules trois ou quatre ont une bonne diffusion. A cela s’ajoute plus d’une centaine de compagnies semi-professionnelles et amateurs”. Chez les pros, chacun ses spécificités et ses fonctionnements. Pour Kader Attou, "le hip-hop est un outil pour aller à la rencontre des autres. Le dialogue entre les cultures, entre les arts, l’ouverture sur d’autres langages, c’est la marque de fabrique de la compagnie”. En Inde, à Alger, Venise ou Cuba, Accrorap sillonne le monde et s’inspire de cet ailleurs, empruntant ses danses. “En voyageant, on s’est rendu compte que le hip-hop existait partout dans le monde. Les bons danseurs se connaissent entre eux, tout le monde connaît tout le monde”. Habité par la recontre, Kader ne fait jamais d’audition. Il sollicite des gens qu’il a croisés plusieurs fois et avec lesquels il a envie d’aller plus loin. Loin des battles régionales, nationales ou internationales, il les amène dans son monde, où le hip-hop croise la poésie et l’émotion comme dans “Petites histoires.com”, créé mi janvier à Suresnes et à découvrir fin février à Besançon.
Aline Bilinski
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