Sans dévoiler l’histoire, quelle thématique abordez-vous dans ce film ?
Le tournage a eu lieu en Algérie, dans la région des Aurès, dont je suis originaire, une région très rarement montrée au cinéma. “La Maison jaune” est même un des premiers films de fiction réalisé là-bas. C’est une région que j’ai quittée il y a très longtemps, à l’âge de 6 mois, et où je ne suis retourné que très tard, il y a quelques années. J’ai alors été marqué par la beauté des paysages et les rencontres avec des gens simples. A travers ce film, j’ai voulu m’intéresser à ces gens qui vivent dans la montagne et qui portent des valeurs auxquelles j’accorde beaucoup d’importance, l’humanité, la générosité, dans un environnement à la fois grandiose et dur. L’histoire est celle d’une famille qui porte un deuil et qui, grâce à l’amour et à la tolérance autour d’elle, va apprendre à se reconstruire et à aimer la vie. J’ai vraiment voulu faire un film d’espérance.
On vous connaît également comme romancier. Pourquoi avoir choisi de vous exprimer par le cinéma ?
A la base, je m’exprime avec des images. J’ai déjà fait un film, “Sale temps pour un voyou” en 92. Puis j’ai traversé une période difficile où ce que j’écrivais ne fonctionnait plus. J’ai rebondi avec un roman, “la Cité des fausses notes” en 2001, qui a coïncidé avec mes retrouvailles avec l’Algérie. J’y ai fait un documentaire puis il y a eu l’idée de ce film. Mais il y a un point commun avec l’écrit, qui est le scénario.
Comment s’est monté le film ?
J’ai su qu’on tenait quelque chose quand la fondation Beaumarchais a octroyé une bourse pour récompenser “un très beau scénario”. Puis il y a eu le Conseil régional : Pierre Arditi, président du fonds d’aide à la production cinématographique a lui aussi beaucoup aimé et c’est grâce à ce soutien très fort et à celui du CNC qui a suivi que l’on a pu démarrer la production. Pour cela on avait créé Sarah films, société de production et de distribution, en 2005. Je crois qu’il est important de connaître les mécanismes de production et de distribution. Mieux on les maîtrise et plus on a de chances de faire exister un projet. L’existence de Sarah films est due à cette volonté. Je n’ai pas envie de faire un film qui reste sur une étagère... On a fait le film avec assez peu de moyens et aucun soutien d’une chaîne de télé, ce qui est très rare. Comme il est très rare qu’un film soit entièrement piloté, de sa conception jusqu’à sa distribution, par une société installée en province. On a pris un risque car le système français est ainsi fait que sans distributeur ou chaîne de télévision en amont, il y a peu de chances qu’un film puisse exister. Mais on a eu la chance d’être sélectionnés à Locarno, un des plus grands festivals de films d’auteurs. Et puis un élément fondamental a permis d’aboutir : la formidable énergie de tous ceux qui ont participé au film, une équipe relativement jeune dont beaucoup participaient pour la première fois à un tournage. Le directeur de la photographie par exemple sortait juste de l’école de cinéma. C’est une addition d’envies qui a fait aboutir le projet. Avec la satisfaction de se dire, sans tomber dans une forme de régionalisme quelconque, qu’il y a suffisamment de compétences en Franche-Comté pour faire un film.
Le film semble avoir reçu un bon accueil dans les festivals.
Le fait d’être sélectionné à Locarno, de se retrouver en compétition avec des gens très connus c’est déjà quelque chose. D’un coup, c’est 700 journalistes, des télés du monde entier. Juste après avoir dit oui à Locarno, on a été sollicité par le festival de Venise mais comme on ne peut participer à deux grands festivals, on a dû refuser l’invitation ! A Locarno on a eu 3 prix et le film a été acheté pour être distribué en Suisse. Ensuite, il y a eu d’autres festivals : Valence, avec le prix de la meilleure musique (et du meilleur film, NDLR), Montréal, Le Caire, Dubai, Rotterdam et beaucoup d’autres demandes que l’on doit décliner car cela coûte quand même du temps et de l’argent.
Votre cinéma est-il influencé ?
Le néo-réalisme italien m’a énormément marqué. J’aime aussi l’énergie débordante de Fassbinder, la maîtrise de Kubrick, la poésie de Kiarostami et le côté esthétique de certains Japonais. Alors il y a certaines influences, mais ma passion, ce qui m’intéresse, c’est sublimer ce qu’il y a de plus beau chez les gens les plus simples.
Recueilli par Stéphane Paris
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