Eric Dolphy – Hat and beard (1964)
Extrait de
Out to lunch !, album enregistré en une seule session et considéré comme une pièce de choix du jazz d’avant-garde et du célèbre label Blue note. C’est l’un des derniers enregistrements d’un multi-instrumentiste américain qui devait mourir quelques mois plus tard.
Pavement – Here (1992)
A l’époque, le premier album de Pavement fit sensation au-delà du monde de l’indie rock et des college radios, avec son ambiance slacker et ses morceaux destructurés. L'entame est représentative de l’ironie détachée dont fait souvent preuve Stephen Malkmus :
«j’étais fringué pour le succès, mais le succès ne vient jamais».
Aaron Neville – Hercules (1973)
L’un des Neville Brothers dans l’un de ses titres les plus célèbres, conçu avec Allen Toussaint, autre musicien de La Nouvelle Orléans. Une ville présente tant dans les paroles (la rue est dure, il faut être Hercule pour l'affronter) que dans le métissage musical : chant soul, accords funk, piano local, percussions créole.
The Slits – Newtown (1979)
Un groupe identifié punk, moins par le style musical que par l’occurrence (The Slits a été formé dans le bouillon de culture punk londonien de 1976 et jouait déjà ce titre en concert en 1977), l’énergie, l’indépendance d’esprit et la provocation (le nom du groupe, la pochette et des paroles telles que
«gimme another fix, If not I’ll go sick»). C’est peut-être ce qu’il fallait à des filles pour s’imposer dans un monde masculin – même si les musiques actuelles sont sans conteste l'un des domaines le plus ouvert aux femmes. A divers titres, les dénommées Nina Hagen, Siouxsie Sioux ou Barbara Gogan ont retenu quelques leçons.
DAF – Absolute body control (1985)
Ces héritiers de l’électronique allemande l'orientent vers la new-wave en version dance et robotique dans un univers plus ou moins partagé avec les Associates, Soft Cell, Gary Numan mais aussi les Depeche Mode et New Order des débuts.
Nas – New York state of mind (1994)
Nas est fils de jazzman et fait du hip-hop. A 21 ans, avec son premier album (
Illmatic), le jeune homme frappe fort et relance à lui seul le rap new-yorkais. Sur ce titre, son flow vindicatif raconte l’enfer des gangs de rue sur fond de scratches, de boucles de piano lancinantes et de samples de morceaux de jazz.
Neu ! - Hallo gallo (1972)
Premier titre du premier album de Neu!, l’un des groupes emblématiques du courant paresseusement appelé krautrock (parce qu’il vient d’Allemagne comme la choucroute).
Hallo gallo est lui-même caractéristique : morceau long, instrumental, où les sonorités de guitares tissent des accords en s’appuyant sur un rythme imperturbable comme le temps qui s'écoule.
John Coltrane – Olé (1961)
Saxophoniste d’avant-garde, John Coltrane est un nom que même ceux qui ne connaissent pas le jazz connaissent, à l’instar de Miles Davis, auquel ce titre ferait référence via l’Espagne (le trompettiste avait signé
Sketches of Spain l’année précédente).
Brian Eno – The big ship (1975)
Après avoir débuté par l’aventure exubérante Roxy Music, Brian Eno prit en solo une direction totalement différente et beaucoup plus calme que ses assauts de claviers glam, allant jusqu’à inventer un genre : l’ambient – en poussant un peu plus loin la logique de la musique planante. Ses répercussions s’entendent encore dans de nombreux albums electro. Et de nombreux films, puisqu’il est question de poser une atmosphère.
Small Faces – I’m only dreaming (1967)
Steve Marriott n’est peut-être pas la voix la plus connue de la pop anglaise des sixties, mais assurément l’une des plus originales. Un incroyable véhicule à émotions, au phrasé très caractéristique (écouter «
when I look into your eyes») comme les variations de registres de ce titre en témoignent : le vocaliste passe d'un ton attristé, presque plaintif à celui d'un shouter dont l'espoir se réveille avant de revenir à la résignation (
«i’m only dreaming»), en accord avec des paroles qui accolent smiling et crying.
John Holt – Ali Baba (1969)
Un reggae nonchalant et même relâché pour raconter un rêve de princes et princesses à une soirée... reggae. A la fin des années 60, le label Trojan introduit avec succès le reggae sur le marché britannique, le rendant populaire auprès du public avec un effet sur bien des artistes à venir.
The Shins – Phantom limb (2006)
Une mélodie lumineuse comme sait en trouver régulièrement James Mercer, leader des Shins, dont il est le seul membre permanent. Association d'une voix haute, de guitares électriques, d'un rythme sixties, de chœurs qui font oh oh : la pop à son meilleur.
Vic Chesnutt – Maiden (1998)
Vic Chesnutt a disparu il y a 10 ans, à l’âge de 44 ans. Mais auparavant, en 2 décennies, il aura eu le temps de graver une quinzaine d’albums, dont le quadruplé
Drunk/Is the actor happy ?/About to choke/ The Salesman and Bernadette, lui valut une certaine notoriété au milieu des nineties. A noter sur ce titre la présence de Kurt Wagner, explorateur de l’americana avec son groupe Lambchop, dont les sonorités de ce "Maiden" se rapprochent.
The Kinks – Days (1968)
Ray Davies est l'un des grands songwriters de l'histoire de la pop : observateur de la société anglaise, parfois avec ironie, parfois avec nostalgie, toujours avec finesse. Ici, il chante un adieu sans être larmoyant : la musique évite à l'adieu d'être tout à fait définitif, puisqu’on peut rappeler par le chant
«those endless days».
Lucy Dacus – The shell (2018)
Le titre le plus récent du choix de Nicolas Sauvage émane d’une jeune américaine, auteure de 2 albums. Par chance, elle expliquait elle-même
au magazine Newsweek de quoi il est question : une chanson inspirée de l’absence d’inspiration (!), de burnout créatif et du vide qui habite à l’artiste à ce moment.
Paul Weller – Hung up (1993)
Spécialiste de Paul Weller, à propos duquel il vient d'écrire le premier livre en français (1), Nicolas Sauvage a décortiqué la discographie de l'une des figures actuelles de la scène anglaise. Il évoque
«le charme singulier de cette chanson» : «La mélodie est d’une grande fluidité, l’exécution de la prise conservée n’a, selon son auteur, jamais été égalée par la suite. C’est surtout vocalement que Paul Weller s’impose. S’il était interprété par un chanteur médiocre, ce titre aux accents pop-soul sixties ne retiendrait sans doute pas l’attention, sa construction étant somme toute assez classique. L’essentiel se joue sur une interprétation gorgée de soul puis sur la production vintage souhaitée par Weller. Les choeurs qui interviennent en fin de morceau sont par ailleurs impeccables».
(1)
Life from a window, Paul Weller et l'Angleterre pop, aux éditions du Camion blanc.
The Beach Boys – ‘Til I die (1971)
Rendu presque fou par une quête de la perfection pop qui devint fuite en avant, Brian Wilson, principal compositeur des Beach Boys, connut une carrière post sixties chaotique, faite de tentatives de retours épisodiques.
Surf’s up !, le titre de l'album, n'est pas étonnant venant des Beach Boys. La pochette montrant un cavalier indien épuisé l'est beaucoup plus. Elle annonce le contenu. Finies les sixties, finis le surf, les filles et les voitures. L’océan n’est plus symbole de joie de vivre mais de questionnement métaphysique. Des Beach Boys de 1962 demeurent cependant l'estampille des chœurs et harmonies vocales.
Miles Davis – Bags groove (1954)
L’un des instrumentistes les plus influents du jazz, le trompettiste Miles Davis réunit les talents pour un morceau d’anthologie qui laisse une belle place au vibraphone de Milt Jackson (créateur du titre) et au piano de Thelonious Monk.
Buzzcocks – Why can’t I touch it ? (1979)
Créé en 1976, le groupe fait partie de la première vague punk anglaise. Punks : morceaux courts et vifs, attraits pour des éléments du reggae, paroles parfois anecdotiques. Non punk : deux guitares, une façon de chanter particulière parfois plus proche des sixties (comme sur les premières phrases de ce titre) que des éructations inhérentes au genre.
Desmond Dekker – (Poor mi) Israelites (1968)
Qui n’a pas entendu la voix singulière de Desmond Dekker lancer
«get up in the morning, slaving for bread, sir» puis partir dans son falsetto sautillant ? Ce morceau peut être considéré comme le premier hit international du reggae. Comme le titre original l’indique, il s’agit d’une complainte sur la pauvre condition des rastafaris, communauté alors ostracisée en Jamaïque. Bob Marley allait changer la donne, un peu plus tard.
PJ Harvey – Oh my lover (1992)
Le premier morceau du premier album de PJ Harvey (10 ont suivi depuis) pose les principes de son oeuvre : une voix et une voie affirmées, sans concession, une ambiance qui n’est pas à la joie débridée, mais dont il émane une certaine intensité, comme une sorte de Nick Cave féminine. Ici, elle chante que ce n'est pas grave si son amant en aime une autre. La guitare lugubre fait savoir que cette affirmation n'est pas si certaine.
Art Pepper – The trip (1976)
Auteur d’une pléthore d’enregistrements, non seulement comme accompagnateur mais aussi en leader, le saxophoniste Art Pepper a couvert quatre décennies de jazz. Une vie de musicien complétée de séjours en prison pour usage de stupéfiants. Ce titre y fait référence : ses codétenus lui demandaient régulièrement de jouer pour les «faire voyager». Pour l’accompagner dans ce "Trip" : le pianiste George Cables, le bassiste David Williams et le batteur Elvin Jones.
The Jesus and Mary Chain – Cherry came too (1987)
Après le coup de semonce sombre et introverti de
Psychocandy, les frères écossais Jim et William Reid éclaircissent un peu le jeu avec
Darklands, entamant une évolution de carrière qui les aura vu passer de la noise à la pop. A l’image de leurs relations conflictuelles de frères Gallagher avant l’heure ou d’un de leurs titres -
Barbed wire kisses -, ils manient en même temps aigreur et douceur, noirceur et lumière, guitares abrasives et mélodies, et deux voix qui se marient beaucoup mieux que leurs caractères.
Elvis Costello – Beyond belief (1982)
Etrange morceau de Costello au cours duquel les instruments construisent un support à la voix ; laquelle change fréquemment de registre, descend ou monte les octaves dans la même phrase, et commande le rythme en accélérant ou ralentissant à la guise d’un texte dense qui s’écoule comme un flux de conscience. Elvis Costello est un lettré.
XTC – I’d like that (1999)
Après des débuts new wave, marqués par le tube
"Making plans for Nigel", ce groupe est venu peu à peu à l’ambiance dans laquelle ses membres ont grandi, la pop anglaise des sixties, au premier rang desquels Kinks et Beatles. Ce titre montre à quel point Paul McCartney fut important.
Sly and the Family Stone – Sing a simple song (1969)
Sly Stone, l’homme qui a relayé James Brown pour envoyer le funk dans une ambiance psychédélique, à l’aide d’une family capable d’ajouter des ingrédients pop, soul, rock… Quelques années plus tard, Prince s’en est souvenu. Là il est question de ne pas s’en faire et de chanter, même si c'est tout simplement
«ya ya ya ya ya», car
«le temps passe, on vieillit, les choses arrivent vite».
Wire – I am the fly
Que faire après la révolution punk ? Wire, plus ou moins associé au mouvement avec son premier album, apporte une réponse dès le suivant en ajoutant synthétiseurs et structures plus élaborées. Mais en conservant une certaine marque de fabrique : rigidité rythmique, accords minimalistes, chant ironique pour proclamer
«je suis la mouche», celle du coche, qui gêne, perturbe et introduit le vers dans le fruit.
The Velvet Underground – Pale blue eyes (1969)
Parfois Lou Reed s’apaise et romantise. Cette fois, c'est en s’attardant sur les yeux bleu pâle d’une femme mariée (d’où une certaine tristesse à prononcer
«sometimes I feel so happy»). Le son minimaliste (tambourin paresseux, guitare discrète) est à l’avenant : plus proche de la tranquillité de "Sunday morning" que du martèlement de "I’m waiting for the man".
Billie Holiday – All of me (1941)
Un standard du great american songbook (Ella Fitzgerald, Frank Sinatra, Dean Martin s’y sont collés eux aussi) magnifiée par la voix de Billie Holiday qui n’a pas besoin de surenchérir dans la tristesse et, au milieu, par un solo de Lester Young.
S.P.
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