Des joueurs, des spectateurs par milliers, des téléspectateurs par millions. Des amateurs et des professionnels. Des passionnés et des stars. Des équipes et des sponsors. Des fans et du merchandising. Des compétitions, des confrontations, des tournois, des classements internationaux. Des entraînements intensifs, des performances, des records. Du spectacle, de la mise en scène. Si certains ne sont pas encore convaincus que l’e-sport, c’est du sport, ces points communs peuvent faire réfléchir.
Etymologiquement, le mot sport est à rapprocher de divertissement ou jeu. La notion de performance physique a été ajoutée. Mais même ces critères de résistance, de coordination, d’endurance, d’habileté sont applicables à l’e-sport. Arnaud Moulet est directeur général de l’agence
Sigma esports qui gère notamment le club esport Gameward. Il décrit
« des joueurs pro qui sont des athlètes avec plannings d’entraînement, séances spécifiques, coaches, suivi médical et alimentaire, etc. On remarque des similitudes : les joueurs progressent jusqu’à 25 ans mais ensuite stagnent et compensent par l’expérience. Mais c’est surtout l’écosystème qui est très proche de l’écosystème sportif». Quand il recrute, Gameward tient compte du niveau mais aussi de la philosophie de jeu et de la personnalité.
La simulation sportive est marginale
Arnaud Moulet évalue à 150 le nombre de joueurs pro en France, une dizaine d’équipes qui font vivre le joueur et un tissu associatif d’une soixantaine de clubs, sans compter certaines associations de fait. Mais le secteur évolue vite, parfois en tâtonnant encore. En Bourgogne-Franche-Comté, on compte quelques tentatives plus ou moins intermittentes, deux pôles actifs (PAD à Dijon, Supersmashbros à Besançon). Côté pro, le club de foot DFCO préfère garder silence
« car notre partenariat avec Team Vitality est encore en cours de validation » (Team Vitality est l’une des équipes majeures de l’e-sport en France).
« Attention, précise Arnaud Moulet, on parle d’e-sport, mais les jeux de simulation sportive sont marginaux en termes d’audience. On doit être à moins de 5 % du secteur. Loin des jeux les plus regardés comme League of legends ou Fortnite ».
Esprit festif
Comme beaucoup, Arnaud Moulet est arrivé dans ce milieu par passion pour les jeux vidéo, en rencontrant un autre amateur, David Laniel, avec qui il a fondé
Sigma esports en décembre 2017.
« Avant on était salariés dans d’autres domaines. On était dans le jeu vidéo en loisirs, on organisait des petits tournois et on s’est rencontrés comme ça. Quand on a vu que le marché commençait à se développer, on a décidé de se lancer. » Aujourd’hui, ils s’adressent à tous types d’acteurs ayant besoin d’être accompagné dans un projet e-sport, y compris les sponsors.
« C’est un super outil de communication pour s’adresser aux jeunes ».
Dans leur agence, on note la présence de Julien Benneteau, ancien tennisman professionnel et capitaine de l’équipe de France féminine de tennis. Il officie comme directeur sportif. Le monde du sport n’est pas loin.
« Les modèles économiques restent compliqués, mais on reçoit aussi de plus en plus de demandes ».
L’événementiel épouse celui du sport sur tous les aspects, que l’on pense commercial, marketing, logistique, réalisation…
« Mais surtout, ça nous fait rêver. Comme pour le sport, ça tourne autour du festif ». Il y aura ceux qui associent sport et santé.
« L’amalgame entre jeu vidéo et abêtissement est inopérant. Mais il est certain que la pratique doit être accompagnée et adaptée en fonction de l’âge ». En 2016, une fédération française (
France Esports) a vu le jour. Objet : développer, promouvoir, encadrer la pratique des sports électroniques dans un esprit d’équité et d’épanouissement humain, s’inscrivant dans les valeurs et les principaux fondamentaux de l’Olympisme (article 1 de ses statuts). Nicolas Besombes, vice-président, l’exprimait dans une intervention :
« Il est important que le développement de l’e-sport soit accompagné de manière éducative pour encadrer les jeunes dans une pratique qui soit la plus saine, la plus responsable et la plus sereine possible ».
Une différence peut-être : même s’il a subi, avec la crise sanitaire, les mêmes vicissitudes que les autres avec annulation et reports d’événements, l'e-sport a pu s’adapter et rebondir plus facilement, support oblige. A un moment donné, les seules compétitions à suivre en direct étaient celles d'e-sport. La crise a même dû faire découvrir ce monde aux amateurs de sport.
Stéphane Paris
Commentaires
Afin de poster un commentaire, identifiez-vous.