Troll’s production vient d’annoncer la présence de Fauve au prochain
festival de la Paille (1). Vue de l’extérieur la maison Troll’s prod traverse une période faste : émergence de
Catfish, parutions récentes de bons disques (Catfish encore, mais aussi Monsieur Pink, Prowpuskovic, Nadamas, Pascal Mathieu dans des genres très différents), concerts de qualité assurés par les 10 artistes maison dont fait partie la blues woman Ana Popovic (2). Le tout avec une équipe de 5 personnes au Frasnois (près de Champagnole) et une à Paris. Mais la notoriété ne rend pas les choses plus faciles.
«C’est de moins en moins simple assure Aurélien Bouveret, fondateur de l’association.
Le festival de la Paille a de plus en plus de succès, ce qui suscite des attentes auxquelles il faut répondre. On dépend du budget, de la disponibilité des artistes, de la concurrence. Il faut essayer d’avoir des exclus, garder son identité. La première édition de la Paille a peut-être coûté 20 000 F. Là on est à 550 000 euros. Il y a 15 ans, il y avait beaucoup moins de contraintes, de normes, d’exigence du public. Avant on s’en foutait, on n’y connaissait rien, on faisait jouer les groupes pour 300 euros dans un bar et on allait boire un coup après. Aujourd'hui, il faut faire beaucoup plus pour beaucoup plus d’argent pour faire les mêmes choses qu’avant».
Autre exemple, la réussite de Catfish est une satisfaction, mais il faut se montrer à la hauteur.
«Au début, il n’était que deux. Puis 3 quand on leur a mis un régisseur pour les aider. Maintenant, ils partent à 5 sur la route». Conclusion :
«On est plus connu qu’avant mais économiquement, cela reste tendu». Symboliquement, la partie production de disques, qui étaient à la base du projet, va diminuer. Pas assez rentable. «
Un disque coûte 30 à 50 000 euros. C’est d'ailleurs ce qui nous a amenés à faire du booking parce que c’est avec les concerts que l’on vend des disques».
La Paille a vu le jour il y a 15 ans. Troll’s prod en est en quelque sorte issu, il y a 11 ans.
«J’y ai joué la 3e année dans un groupe punk-rock relate Aurélien.
Puis je me suis occupé de la com puis du site web puis de la prog. Au fur et à mesure de l’évolution de mon poste de bénévole, j’ai eu envie de m’investir alors j’ai créé Troll’s prod qui a bénéficié du festival. Mais ce sont deux structures différentes».
Bonne réputation
En partant de rien et en se formant sur le tas, Troll’s prod a abouti à une structure qui est à la fois une agence de booking et de management d’artistes, un label, un organisateur de concerts et de festivals (dont
Rock'n'troll), un studio d’enregistrement et une réputation qui garantie une certaine qualité de prestation. Des festivals mais aussi des collectivités font appel à elle comme prestataire de régie.
«On nous fait confiance sur le plan artistique signale Aurélien. Quand on organise pour des tiers, on n’a pas toujours carte blanche mais on essaie de promouvoir des styles musicaux qu’on aime, de ne pas aller vers des groupes trop FM».
Rançon de l’activité, les nécessités augmentent.
«Nous sommes employeurs d'artistes, avec ce que cela comporte d'administratif. On s’occupe des droits, des fiches de paie, de la logistique des tournées, de trouver un distributeur pour les albums, de la com. De trouver un graphiste ou une équipe vidéo s’il faut tourner un clip. Nous les défendons et les protégeons pour qu’ils se concentrent sur leur musique et leur spectacle. C’est un peu moins rock’n’roll qu’avant. D’ailleurs j’ai moins de temps pour écouter de la musique ou aller en concert. Mais ces nécessités sont vraies pour n’importe quel artisan. Ce que nous sommes sauf que nous n’avons pas un produit mais des êtres humains avec ce que cela induit de difficultés, d’exigences, de doutes. Il faut tenir compte de leur vie sociale et familiale. A force, on devient de très bons amis mais ce n’est pas toujours évident de mêler vie personnelle et travail».
Travail rural
Cela en restant basé à la campagne.
«De toute façon, c’est à Paris que ça se passe. La visibilité en Franche-Comté, on l’a. Que l’on soit ici ou à Besançon ne change rien, on fait notre truc avec nos convictions. Excepté qu’on a l’avantage de garder la tête froide par rapport aux querelles de voisinage et aux petites histoires du milieu musical, qu’on n’entend pas les gens qui nous critiquent et qu’on a des grands locaux avec un petit loyer. On est un peu ruraux aussi. Ce qui nous fait triper, c’est toujours d’organiser des petits concerts, parfois dans les champs ou la forêt. On a déjà fait un festival dans les arbres en installant chapiteau, électricité, eau. On a déjà mis des projecteurs dans la flotte à la source de la Loue».
Stéphane Paris
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