Du bout de sa baguette et du haut de ses 33 ans, Mathieu Charrière a déjà dirigé plusieurs orchestres : à Saint-Etienne, Genève, Zurich ou Madrid, en passant par Besançon. Trompettiste à la base, il passe devant les musiciens à l’âge de 18 ans, dans l’orchestre d’harmonie de sa ville d’origine, Nogent (Haute-Marne). « Ce fut une découverte spectaculaire, confie-t-il, j’étais comme un enfant. » Il est alors élève au Conservatoire de Besançon, en parallèle de ses études de musicologie à la faculté de Franche-Comté. Naturellement, il s’inscrit dans la classe de direction du chef Pierre Migard. Son projet de devenir professeur de trompette est vite doublé du désir de manier la baguette. À Besançon, il dirige notamment les orchestres du conservatoire, mais aussi celui des Chaprais. Puis il poursuit ses études à l’École normale de musique Alfred Cortot, à Paris, puis à la Haute École de musique de Genève, dans laquelle il obtient un bachelor puis un master en direction d’orchestre, en 2016.
Main droite, la rythmique ; main gauche, les sentiments
Aujourd’hui installé près de Genève, où il est directeur d’une école de musique, Mathieu Charrière n’en oublie pas pour autant Besançon, sa « ville d’adoption ». « J’y ai passé sept ans, j’ai une affection particulière pour cet endroit, où j’ai encore beaucoup d’amis. » Il se rendra dans la Boucle dans quelques semaines, pour le concours international de jeunes chefs d’orchestre, connu comme l’un des plus prestigieux dans son genre. Les candidats viennent des quatre coins du monde. « Il y a des finalistes exceptionnels », admire Mathieu Charrière.
Pendant encore deux ans, le jeune homme a choisi de multiplier les master classes et les concours de chefs d’orchestre. « La plupart sont ouverts aux moins de 35 ans. En plus d’être formateurs, les concours sont un moyen de faire ses preuves », explique le candidat : « Un peu comme un joueur de foot, on cherche à se faire repérer par une agence, une maison d’opéra, une maison d’orchestre. » Pour se préparer, Mathieu Charrière planchera sur les partitions que joueront deux pianistes le jour des présélections. « Je cherche à comprendre ce qu’a voulu dire le compositeur puis je travaille la gestique pour me faire comprendre auprès des musiciens », décrit-il. Dans la main droite, la baguette – délaissée par certains chefs – donne le cadre rythmique et spatial. Avec la main gauche, ce sont les sentiments, les nuances, qui doivent s’exprimer. « Et nous dirigeons avec tout notre corps, assure Mathieu Charrière, tout notre être doit transpirer la musique. » En attentant le jour J, le jeune homme travaille « dans le vide » : « C’est la frustration d’un chef d’orchestre ; notre instrument, c’est l’orchestre, on ne peut pas l’avoir à disposition n’importe quand. »
S’il passe le premier tour, Mathieu Charrière comptera parmi les 20 finalistes du concours, prévu pour septembre prochain, à Besançon. À la clé du grand prix du jury : 12 000 euros, un accompagnement artistique de trois mois et un engagement avec les orchestres partenaires du concours. Et surtout, une visibilité remarquable.
Camille Jourdan
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