En cet après-midi ordinaire de juin, la quiétude du circuit du Rosemont, à Besançon, tranche avec la fureur attendue au même endroit dans quelques semaines pour les championnats d’Europe. Le coach Thomas Barroca a programmé une séance d’entraînement à 16 h, malgré le cagnard implacable sévissant depuis plusieurs jours sur la capitale comtoise, et les ténors du grand club bisontin (300 licenciés) arrivent au compte-goutte. Le premier à se pointer ? Léo Garoyan, 23 ans, carrure de déménageur, chaussettes pas comme les autres et casquette vissée sur la tête. Le champion du monde U23 en titre, détendu et disponible, prend le temps d’envoyer quelques textos aux copains avant de se mettre en tenue et d’échanger tranquillement avec son coach à propos des échéances à venir comme la conférence de presse préchampionnat d’Europe, le design du nouveau maillot ou le déplacement pour la prochaine compétition.
A 23 ans, le Varois de naissance est conscient de s’entraîner dans le meilleur club français, de quoi performer et gagner sa place pour Paris 2024, une affaire loin d’être acquise tant le niveau du BMX tricolore est élevé. « Rien n’est fait ! En France, on est 8 pour trois places et je suis actuellement 4e. Mais je n’ai pas le temps d’attendre, je veux me qualifier pour ces JO-là ! »
Des hauts et des bas
Le parcours de Léo n’a pas été simple, le destin s’étant chargé de glisser quelques peaux de banane sur son chemin. Après ses débuts en BMX en 2004 à Sainte-Maxime, cumulés à d’autres sports, comme le basket, le foot ou le badminton, il rejoint une section sportive à Aix-en-Provence et progresse rapidement mais rencontre au début des années 2010 des problèmes familiaux difficiles à surmonter. « A ce moment-là, j’ai failli tout arrêter mais mon entraîneur de l’époque, Simon Duchène, m’a redonné le goût » explique-t-il avec gratitude. Léo intègre en 2017 le pôle France à Bourges et les résultats arrivent en rafale : deux titres de champion de France juniors en deux jours, en time trial (1) et en ligne, un autre de champion d’Europe et celui de champion du monde en 2018 ! Passé le break de la Covid, il court en élites et empile les titres de champion d’Europe par équipe. Sa saison 2022, qu’il effectue dans la catégorie U23 nouvellement créée, est quasi parfaite également puisqu’il écrase la concurrence en Coupe du monde, avec quatre victoires et deux autres podiums en huit courses, puis rafle le titre de champion du monde à Nantes (« mon plus grand souvenir ») pour compléter le tableau !
Aujourd’hui, les Jeux olympiques sont dans sa tête et pour décrocher la qualif, un travail de longue haleine s’impose. L’entraînement semble au niveau de l’objectif : « Je viens sur la piste et sur la ligne de sprint tous les jours. Il faut travailler la technique bien sûr, mais aussi l’agilité, la souplesse, le mental. Je fais aussi de la salle pour l’explosivité et la force ».
La mode, les fringues…
Tous les rendez-vous de la saison, qui comporte 16 manches, compteront. Alors Léo fait le métier mais pas de cadeau. Le BMX ne laisse pas de place aux enfants de chœur : sur les huit fous furieux qui s’élancent de la butte de départ et passent de 0 à 50 km/h en 25 mètres, un seul lèvera les bras à l’arrivée. Il faut savoir prendre des risques, quitte à parfois abandonner sur la piste une clavicule, une rate, une cheville ou un poignet…. « Il faut accepter la casse. A chaque fois, j’y retourne, je n’ai pas peur. Le jour où cela sera le cas, cela sera peut-être l’heure de la retraite sportive ! » Peut-être l’heure alors d’ouvrir un commerce et de vivre de sa grande passion pour la mode. « Le sport, c’est mon travail. En dehors de la piste, je suis un grand amateur et collectionneur de chaussures et de casquettes. »
Christophe Bidal
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