Mathilde, quelle est votre actualité ?
J’ai coupé assez tard la saison dernière, le 12 novembre exactement avec une course au Chili. Donc j’ai repris l’entrainement début janvier. C’est la phase de préparation, en période hivernale. C’est la plus dure. On s’entraîne entre 28 h et 30 h par semaine.
Vous faites beaucoup de volume, pour « faire la caisse », c’est ça ?
Exactement. On coule le béton, on pose les briques ! Et ensuite, tout sera en place pour être à 100 % de notre potentiel au moment de démarrer la compétition, fin mars, avec une coupe d’Europe à Quarteira, au Portugal.
« Une vie de rigueur »
Où et comment vous entrainez-vous ?
Je suis licenciée à Gray depuis 2018, un club familial comme je le souhaitais, qui réunit tous les critères que je recherche. Mais je m’entraîne à Saint-Raphaël, au Pôle France de Boulouris exactement, où je suis arrivée à 19 ans. J’ai eu la chance d’être bien entourée, d’avoir des entraîneurs qui m’ont appris la rigueur. Nous sommes trois filles et deux garçons dans le groupe. La semaine type est la suivante : on nage six fois dans la semaine, de 7 h à 8 h 30, puis on fait entre 1 h 30 et 4 h de vélo. Le soir, c’est course à pied. Entre-temps, récup et alimentation.
Cela ne laisse pas trop la place à autre chose...
On a une vie de rigueur, sans extra car le moindre écart, on le paie ! Mais cela ne durera qu’un temps, alors autant faire le métier à fond. J’aurai le temps de faire plein de choses après. La vie sociale d’un triathlète de haut niveau est limitée, mais moi je ne suis pro que depuis un an. J’ai fait d’autres choses, je travaillais à côté, j’ai été surveillante d’internat, entraîneur de natation, donc je connais pas mal de monde ici.
Quelle est la discipline où vous êtes la plus performante ?
Je viens de la natation, donc c’est la discipline où je suis la plus à l’aise. Je me débrouille assez bien aussi en vélo. La marge de progression, elle est partout, on ne va pas se mentir, mais un peu plus en course à pied.
A quoi pense-t’on en course, sur des formats aussi longs ?
On passe par toutes les émotions. C’est dur. Il faut rester très « focus » sur ce qu’on fait. On pense à la stratégie à adopter.
Comment se décompose une épreuve ?
Un triathlon, c’est 1500 mètres de natation, 40 kilomètres de vélo et 10 kilomètres de course à pied. Cela fait en général 20 mn plus 1 h 20 ou 25 plus 35 à 40 mn d’effort. Soit à peu près 2 heures 15 à 2 heures et demie d’effort.
2024 est une année particulière, le savez-vous ?
Oui, je crois (rires). Tout est jouable, tout est possible tant que rien n’est écrit noir sur blanc. J’ai ma chance pour les JO. La fédération a identifié trois filles qui se détachent et il y aura trois dossards pour la France. Je suis 4e, je suis identifiée en tant que remplaçante. Après, je courrai en début de saison, à moi de saisir l’opportunité de monter que j’ai ma place. Je sens que je suis dans une bonne dynamique. Il m’a fallu du temps pour trouver la bonne façon de m’entraîner, la bonne méthode, le bon groupe, le bon entraîneur. Paris 2024, c’est un grand rêve. Il faut rêver grand dans la vie et avancer par petits pas. Je sens que je suis dans la bonne direction, mais si ce n’est pas Paris 2024, ça sera Los Angeles 2028, j’en suis persuadée !
Entrée en Seine espérée le 31 juillet
Le triathlon olympique s’élancera du Pont Alexandre III. Si vous en êtes, vous nagerez dans la Seine. Est-ce que cela sera particulier ?
On nage toujours en eau libre. Mais chaque milieu a sa particularité. Dans l’océan, il y a des courants et des vagues. La mer, c’est plus plat. Dans la Seine, il y aura des courants aussi. On s’entraîne 99 % du temps en piscine. Mais à l’approche des compétitions, on fait du spécifique. Les bons nageurs sont prêts à tous les environnements. Il faudra s’adapter, par exemple nager sur les côtés s’il y a beaucoup de courant.
Comment voyez-vous l’après triathlon ?
Ma carrière ne s’arrêtera pas là. Le triathlon est un sport qui propose plein de formats. J’aimerais tenter le « longue distance » plus tard. J’ai toujours imaginé l’après-carrière car j’ai été souvent blessée et cela m’a appris que tout pouvait s’arrêter du jour au lendemain. J’ai fait des études et obtenu trois diplômes dans le sport et j’aimerais transmettre aux jeunes mon savoir et mon expérience.
Votre meilleur souvenir ?
Je vais reprendre une phrase de Laurent Vidal, un triathlète français malheureusement décédé : « mon meilleur souvenir, je ne le connais pas encore ». Il a tout résumé. Je prends autant de plaisir quand je termine 10e que 1re du moment que je sais que j’étais à 100 % et que j’ai donné le meilleur de moi-même. Ce sentiment est addictif ! Ce que je peux dire aussi, c’est que les résultats des courses par équipes provoquent une joie décuplée.
Recueilli par Christophe Bidal
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