Emmanuel Brugvin ne peut pas effacer le sourire de ses lèvres. La vie lui sourit. Même si tout le monde craque pour faire de l'an 2000 une année inoubliable, il va avoir déjà du mal à rayer de sa mémoire 1999. Dans les 6 derniers mois, il a eu le temps de monter sur le podium le plus élevé au championnat du Monde de canoë-kayak et de dire «oui» à sa fiancée. Ce sportif de 29 ans vit un moment doux dans tous les domaines et il se trouve sûrement au meilleur moment de sa carrière. «J'ai réussi à mélanger l'esprit de créativité et l'intuition qui me caractérisaient au début avec la rigueur et la sagesse que m'a données l'expérience». D'après lui, c'est précisément ce tandem contradictoire et subtil qui lui a fait mériter la médaille d'or. Un triomphe qui lui avait été dérobé aux Jeux olympiques de 1992 qui, d'ailleurs, avaient eu lieu sur le même bassin : le Parc del Segre de la Seu d'Urgell, en Catalogne. «Ma carrière a été marquée par les touches» se plaint-il tout en se réjouissant de pouvoir construire cette phrase au passé. «Si je n'avais pas touché une porte, j'aurais déjà gagné le championnat du Monde en Grande Bretagne en 1995 et j'aurais eu aussi la troisième place aux Jeux olympiques d'Atlanta en 1996».
Toutefois, c'est à la Seu d'Urgell qu'il a eu la plus grande déception et la plus grande joie. En 1992 il a fait le meilleur temps mais un juge lui a noté une touche que le vidéo ne confirmait pas. L'impuissance devant les faits a été très dure mais l'incident n'a pas pu le démoraliser.
Un bassin bouleversant
«J'avais l'impression qu'on m'avait volé mon titre et cela a été difficile à surmonter mais finalement, j'ai fini par accepter qu'il y a des injustices dans le sport et j'ai réussi à plus ou moins oublier le revers». Il n'est pas rancunier et il est retourné sur le bassin catalan avec un esprit positif. «J'arrive à la fin de ma carrière. J'avais déjà fait trois championnats du Monde sans médaille et je me suis dis : c'est maintenant ou jamais». Et finalement, donc, c'était maintenant. A part la satisfaction d'être le premier du monde, le succès dans la course lui a valu un billet direct aux Jeux olympiques de Sydney. Autre bénéfice pour la future compétition : le bassin artificiel de la Seu est assez similaire à celui d'Australie. «Je vais tout faire pour gagner», affirme-t-il sûr de lui-même avant d'avouer qu'il est en train de dessiner un canoë adapté spécialement à ce style de rivière. Même s'il préfere faire du sport dans des milieux naturels, il reconnaît un rôle à ces installations qui permettent d'approcher le sport dans les villes et d'attirer par conséquent beaucoup plus de gens. «En effet, dit-il, si tous les bassins étaient si bien équipés que ceux de la Seu et de Sidney, ce serait un grand plus pour l'activité». Par ailleurs, il considère que le canoë-kayak est encore vu comme un loisir de baba-cools. Ce sont ce type d'installations et les Jeux olympiques qui peuvent contribuer à rendre l'activité un peu plus professionnelle, de plus haut standing. Enfin, le champion soutient que le canoë-cayak est un sport très visuel et télégénique. Pourtant il est malheureusement très peu médiatisé.
Marta Repullo I Grau
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