Depuis son enfance, Eva Yarova a peint une multitude de tableaux ; certains vendus, d'autres exposés en Russie ou visibles actuellement à Besançon (Galerie Cin d'oeil au centre St-Pierre et Hôtel de Ville) et, à 26 ans, son inspiration débordante ne lui a jamais fait défaut. Dans son travail, elle n'a accepté qu'une seule commande, pour illustrer le livre S'en mêlent les pinceaux pour le théâtre Bacchus. « Mais ce n'était pas vraiment une commande, on m'a laissé entière liberté. C'était un rêve d'enfant de faire un livre pour enfants » explique-t-elle.
L'enfance à St-Pétersbourg, la vie quotidienne en URSS et la culture russe nourrissent son imagination. « Mes parents sont architectes, il y avait une atmosphère très artistique à la maison, avec des meubles sauvés du palais de l'Ermitage à la Révolution ». Très tôt, elle s'est différenciée de l'art officiel prôné par les communistes et lorsqu'elle a suivi les cours d'une école d'art de Moscou, c'était sans se plier aux figures imposées. « C'était une école classique avec une forte influence communiste. L'art devait présenter les choses de façon positive alors qu'à côté il y avait les travaux forcés. Il y avait des sujets interdits comme les scènes érotiques, d'autres à magnifier, les marins, lés scènes de kolkhoze. J'y suis allé juste pour apprendre les techniques.»
Cette différence, elle l'a cultivée dans son art où se mêlent des personnages inventés, des images de contes et des scènes tirées de la réalité. « Il y a des personnages qui reviennent souvent dans mes toiles, qui viennent de l'enfance. On a dit que je fais de l'art naïf, mais ce n'est pas du tout ça. Je préfère art imaginaire ». Dans son pays, plutôt que d'admirer les fêtes officielles du régime, elle préferait inventer les siennes, plus colorées et plus légères à l'image de « La Fête des radis et des citrouilles ». Sa nais-sance, un 21 janvier, l'a peut-être prédisposée à cet état d'esprit : « C'est le jour de la mort de Lénine. Chaque année, c'était un jour de deuil national, avec une ambiance triste. Pour moi, c'était un jour de fête, j'étais la seule à m'habiller en blanc ».
Nouveau style
Mélange de rêve et de noirceur comme dans ce «Noël russe» où l'on voit un pendu, un couple qui se dispute, un lemme qui donne des coups de couteau pendant que d'autres font la fête, son oeuvre se réfère souvent à ses souvenirs de l'URSS d'avant la perestroïka. Ainsi, «Scènes de l'appartement communautaire», toile qui dépeint « des familles vivant les unes sur les autres dans de petits appartements, dans la promiscuité. Une réalité cachée aux étrangers pendant 70 ans et qui existe encore ». Des références au passé qui n'empêchent pas son style d'évoluer, à l'image de ses derniers tableaux, étonnants : « Cette année, j'ai réuni deux styles, le graphisme et la peinture à l'huile en les superposant sur une même toile. J'ai cherché des années avant de trouver ça ».
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Stéphane Paris
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