Chaque jour, Germain Louvet, 26 ans, se rend à l’Opéra au Palais Garnier ou à l’Opéra Bastille, à Paris, en fonction de sa programmation. Sa routine ? Exercices à la barre, pointes, arabesques, pirouettes… Des répétitions et entraînements quotidiens et, les jours de représentations, un passage au maquillage et à la coiffure avant le lever de rideau.
Cela fait plus de vingt ans que Germain Louvet foule les parquets de danse. Alors que son frère aîné faisait du judo, lui a commencé la danse à 4 ans, avec de l’éveil au modern-jazz, dans le club de Givry, commune de Saône-et-Loire où il a grandi. « J'ai toujours aimé danser : à la maison, dans mon jardin, à des fêtes, se souvient-il. C'était une manière pour moi de dépenser mon énergie débordante. »
À 7 ans, il intègre le Conservatoire national de région de Chalon-sur-Saône et débute la danse classique. « Je faisais de la danse pour le plaisir. Au conservatoire, on faisait des démonstrations, des portes ouvertes et sur scène, j’aimais bien qu’on me regarde. Mais je n’avais pas conscience que l’on pouvait se donner en spectacle et en faire son métier ». L’enfant s’imagine plutôt archéologue ou océanologue.
Parfois seul garçon des cours de danse, il reçoit quelques moqueries de camarades. « Ça ne me touchait pas, mais j’avais du mal à comprendre pourquoi certains disaient “la danse c’est pour les filles”, car moi, j’en faisais. »
Il quitte la Bourgogne à 12 ans pour intégrer l’École de danse de l’Opéra de Paris, à Nanterre et découvre que l'on peut faire carrière dans ce milieu.
Étoile à 23 ans
À 18 ans, il est engagé dans le Corps de ballet de l’Opéra national de Paris. Il gravit rapidement les échelons : il est promu "coryphée" en 2014, puis “sujet”, un an plus tard. En 2016, à l'issue de la représentation du ballet Le Lac des cygnes, chorégraphié par Rudolf Noureev, dans lequel il interprète le rôle de Siegfried, il est nommé “étoile”, titre suprême à l'Opéra national de Paris. Il a seulement 23 ans. « C'est quelque chose que je n'avais jamais imaginé se réaliser si rapidement. »
Le danseur s’est produit sur les plus belles scènes du monde. « J'ai adoré danser à la Scala de Milan. C'est un théâtre chargé d'histoire. De grands artistes y sont passés et on le ressent en montant sur scène. » De ses nombreuses représentations à l’étranger, Germain Louvet a gardé un souvenir tout particulier du pays du Soleil-levant : « Il y a une vraie fidélité du public, beaucoup suivent notre parcours depuis le Japon, c'est assez agréable. »
Se ressourcer en Bourgogne
Entre répétitions et représentations, le rythme est soutenu. Et parfois, ponctué de difficultés physiques, voire de blessures : « En ce moment, j'ai un petit œdème sous le pied, donc je suis en reprise. J'ai dû m’arrêter quelque temps. Ca fait partie du métier. On travaille tous les jours avec des douleurs. Il faut accepter que notre corps est notre instrument et que, parfois, notre instrument s'use et demande des soins. »
Pour se ressourcer, Germain Louvet prend plaisir à s’évader tous les deux mois à Givry, où ses parents habitent toujours. « Quand on a grandi à la campagne et qu'on habite à Paris, on a une petite frustration et un besoin de cet air, de cette verdure et de cet espace. C'est très important pour moi d'y revenir, d'avoir un peu de calme. »
Comme tous les danseurs étoiles, Germain Louvet devra tirer sa révérence à 42 ans. « Evidemment, il y a une crainte de se dire qu'on ne dansera peut-être plus jamais aussi bien, admet-il. Mais on regarde nos aînés et on voit qu’on peut vivre notre art différemment ou se convertir. C'est aussi une bénédiction de pouvoir faire une deuxième carrière. »
En attendant, il se remet de sa blessure pour danser, en février 2020, le rôle d’Albrecht dans Giselle, puis de partir en tournée au Japon. Et le danseur étoile nourrit des rêves : monter, un jour, sur la grande table rouge du Boléro de Maurice Béjart et travailler sur une oeuvre de Pina Bausch. « Cela fait partie des rôles qui sont vraiment transcendants, qui sont de l'ordre du fantasme. »
Chloé Marriault
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