Julien poursuit une tradition : il est le 4e Humbert-Droz à travailler pour l’entreprise familiale Reparalux. A 25 ans, il est chef d’atelier dans l’institution horlogère bisontine actuellement dirigée par son père Frédéric. Il y côtoie Jean, son grand-père, président d’honneur qui donne encore des coups de main précieux dans l’entreprise créée il y a 61 ans par Marcel.
Ce n’était pourtant pas si évident, raconte l’intéressé : «quand j’étais au collège, je n’en avais pas trop l’intention. Je suis quand même venu en stage découverte en 3e et ça m’a bien plu. Après réflexion, j’ai préféré allé en CAP plutôt qu’en seconde générale». Direction le lycée Edgar Faure de Morteau où le jeune bisontin a suivi 4 ans d’apprentissage, passant CAP puis brevet des métiers d’art.
Il en est maintenant à sa 10e année dans l’entreprise familiale. Il s’est pris au jeu d’un métier qui demande dextérité, concentration, calme, où l’on est assis mais à l’abri toute la journée. «Un métier où l’on apprend tous les jours. Même mon grand-père en découvre encore assure-t-il. On fait beaucoup de pièces uniques».
Il apprend à bonne école : Reparalux est spécialisé dans la réparation et le SAV des marques les plus prestigieuses, celles de la place Vendôme. L’entreprise a résisté à la crise de l’horlogerie grâce à ce travail dans le luxe, même si elle est passée de 70 personnes au plus haut de l’activité à 15 aujourd’hui.
Naissance d'une marque
En tant que chef d’atelier, Julien gère le travail et le personnel, contrôle, définit les priorités. Il s’est imprégné de l’histoire familiale, impulsant notamment, à l’occasion des 60 ans de l’entreprise, le lancement de montres maison, créées grâce au stock de mécanismes inutilisés accumulés au fil des décennies. Avec lui, Humbert-Droz est devenu une marque. L’entreprise fabrique des petites séries de modèles en moyenne gamme, «destinée à des gens qui aiment l’horlogerie mais n’ont pas forcément les moyens du luxe».
Pour la commercialisation, Julien a opté pour la modernité : uniquement des ventes en ligne (à part quelques exemplaires à la boutique Utinam, située symboliquement près du musée du Temps à Besançon), par l’intermédiaire d’un site et des réseaux sociaux facebook et instagram. Il s’en occupe lui-même. «Je me suis formé en faisant. Ca peut me prendre jusqu’à 2, 3 heures par jour. Il faut mettre des photos, des articles, faire parler de nous, répondre, gérer la clientèle. Mais on a un petit noyau hyper sympa avec des interactions qui nous permettent de tenir compte des remarques pour les créations. Sur facebook, en tant qu’entreprise, il faut payer pour être mis en avant mais en contrepartie on n’a pas besoin de local, ni de vendeur. C’est ce qui nous permet d’avoir des prix attrayants». Autre avantage, une visibilité mondiale. Humbert-Droz a déjà eu des clients dans plusieurs pays d’Europe, aux Etats-Unis, en Israël, au Qatar, «grâce à facebook».
«Mon grand-père, qui n’est pas du tout là-dedans, est hyper surpris de voir d’où viennent les commandes. C’est une belle aventure de vivre ça avec lui !».
Créations à succès
C’est aussi une sécurité, liée à un savoir-faire commun. «On est trois, on a 6 pieds sur terre !» sourit Jean. Leur complicité ravive le patrimoine horloger. «On fait les créations et on les valide tous les 3, en faisant l’inverse des autres : on part des stocks de mouvements dont on dispose pour créer le design». Ils en sont à leur 5e modèle, chacun fabriqué à 2 à 400 exemplaires. HD1 a été épuisée en 3 mois et demi. Elle a été relookée et rééditée en 2017 mais il n’en reste plus que 60 exemplaires. Julien montre fièrement HD4, sortie en septembre : «elle est très spécifique, réalisée grâce à un mouvement allemand qui n’existe presque plus, avec la particularité d’un affichage digital. Elle est compliquée, on a mis un an et demi à réaliser les boîtiers». 130 des 400 exemplaires ont été vendus en très peu de temps. HD5 étonne par son design à damiers : «je suis un grand amoureux des clous de Paris» explique Julien en présentant une montre automatique dont chaque modèle est numéroté (il y a 2 séries de 150 : une en "lunette sablée", l’autre en "lunette polie"). Son regard confirme qu’il a fait le bon choix à l’époque du collège.
S.P.
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