Sa chorégraphie "Anokha" reçoit actuellement un bel accueil aux Pays-Bas. Après l'Inde, le Sri Lanka ou le Mexique, la tournée internationale d'Acccrorap est une réussite. Une reconnaissance pour la danse hip-hop ? Pas seulement. "Anokha" a été élaboré par Kader Attou après un voyage en Inde. Le spectacle mêle hip-hop et danse traditionnelle indienne. Il résulte du souci d'ouverture et de confrontation qui anime le jeune chorégraphe depuis ses débuts. Loin de l'idée d'une culture de rue repliée sur elle-même, il montre que le hip-hop peut s'adapter, dialoguer avec d'autres langages. «Le succès de la pièce montre surtout qu'elle a vraiment une dimension universelle» estime Gilles Rondot, directeur artistique d'Accrorap.
Pour Kader Attou, la danse est spectacle mais a aussi un message à faire passer. "Anokha" dégage des valeurs de paix, de respect, d'harmonie. Auparavant, il avait monté "Prière pour un fou" où la danse protestait contre les massacres en Algérie. «Je m'intéresse depuis de nombreuses années à la question de savoir comment on arrive à faire parler son corps au-delà des mots. Aujourd'hui, je danse dans un seul et unique but : l'urgence de dire. Etre démonstratif juste avec la forme ne m'intéresse pas. En ce sens "Prière pour un fou" a été une étape très importante».
Culture d'ouverture
Ces notions d'ouverture et de message se retrouvent dans la dizaine de créations d'Accrorap. Elles étaient présentes dès "Athina", premier spectacle de 1994, qui associait danse de rue et classique. A l'époque, celui-ci dérangeait ceux qui considèrent ce genre d'association comme une trahison du hip-hop. Pour Kader Attou, c'est plutôt naturel : «Adolescent, mes années passées à l'école de cirque m'ont permis de commencer le hip-hop en n'étant jamais cloisonné». Né il y a 29 ans à Lyon, celui qui est considéré à l'heure actuelle comme une figure majeure du mouvement hip-hop en France est en effet venu au monde du spectacle par le cirque. Pendant une dizaine d'années, il découvre le jonglage, l'acrobatie, les techniques de clown dans une école proche de chez lui. Puis se lance, avec 3 amis de cette école, dans le hip-hop, fondant Accrorap avec eux en 1989. Parmi les éléments déclencheurs, il cite l'émission de Sidney qui, sous des dehors fantaisistes, aura finalement beaucoup fait pour la diffusion de cette culture en France.
La suite est une série de rencontres : Guy Darmet, directeur de la prestigieuse biennale de Lyon, les invite à créer un spectacle pour l'édition de 1994. Ce fut "Athina". «Nous programmer trois soirs de suite à côté de grandes compagnies internationales renommées nous a propulsés sur le devant de la scène et a suscité l'envie d'en faire un métier». Auparavant, il y avait eu Gilles Rondot, plasticien et photographe franc-comtois. «On l'a rencontré en 92 alors qu'il était en résidence à St-Priest. Il devint plus tard conseiller artistique de la compagnie et par sa sensibilité d'artiste et d'homme de terrain, a beaucoup participé à la professionnalisation de la compagnie».
Gilles Rondot dit «s'être reconnu dans le mouvement hip-hop» et leur association dure encore. Elle a été le point de départ de l'installation de Kader Attou et d'Accrorap à Besançon. «Il nous semblait important que Gilles puisse rester à Besançon tout en travaillant avec nous. De plus, énormément de projets artistiques ont vu le jour en Franche-Comté. Installer la compagnie à Besançon était donc une bonne chose». C'est depuis Besançon qu'il contribue, de nouvelles chorégraphies en ateliers de sensibilisation et activités pédagogiques, à la reconnaissance du hip-hop. «A mon avis, c'est désormais une pratique à part entière reconnue par les diffuseurs et le monde de la danse. Mais il reste encore beaucoup de chemin à faire pour qu'elle s'inscrive définitivement dans l'histoire de la danse».
Stéphane Paris
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