C’est un garçon né avec un seul rein mais doté de jambes de marathonien et surtout d’un cœur gros comme ça. Capable de se lancer dans un défi un peu fou - 651 km en courant et en 12 jours, sans assistance et sous une chaleur de lézard - après seulement quelques mois de préparation. De Besançon à Aix en Provence, où il suit des études de droit, en passant par Chalon-sur-Saône, Lyon, Saint-Vallier, La Voulte-sur-Rhône ou Arles, Dylan Pernot, 22 ans, a avalé le bitume avec une régularité de métronome. « Pendant 15 jours, j'ai vécu un rêve partagé avec ma maman qui me retrouvait tous les soirs, en train, sur mes lieux d’étape ! »
A l’origine de cet exploit athlétique colossal, un événement douloureux : le décès de sa grand-mère adorée, sa « boussole », lui qui a grandi dans un contexte familial compliqué. « Je souhaitais faire un truc pour lui rendre hommage. »
Sportif multicarte, ancien footeux, puis arbitre durant quelques saisons, le jeune bisontin court régulièrement, avec à son actif 2 100 km de janvier à août, plus le Marathon de Paris couru en 2h57. Au début de l’été, il rencontre, lors d’un trail à Baume les Dames, les responsables de l’association France Adot, qui promeut le don d'organes et de tissus humains. « J’ai tilté. Je me suis dit ‘je vais me lancer dans un défi sportif et en même temps soutenir cette assoc’ en lançant une cagnotte Leetchi. Ça rendra mon aventure encore plus belle. J’ai dit ‘banco’ »
Il a d’abord fallu dessiner le parcours, caler les dates, définir les villes-étapes, avec plusieurs prérequis : départ à Besançon, arrivée à Aix-en-Provence, journées ni trop courtes pour tout boucler en 12 jours, ni trop longues pour tenir le coup physiquement. Autres points logistiques importants : l’organisation des hébergements tous les soirs pour deux personnes, la préparation du matériel (« je ne me suis même pas servi de ma boussole ! ») et surtout le choix des chaussures, capital.
Des étapes entre 35 et 78 km
Première étape, premier soir, et première galère ! « C’est la seule fois où on ne dormait pas dans la ville-étape et la seule nuit prévue à l’hôtel. J’arrive à Saint-Jean de Losne après 80 km de course et on doit dormir à Dijon. On rejoint l’hôtel en train puis en bus, il est déjà 21 h. Je montre ma réservation, je ne suis pas enregistré et c’est complet ! Par chance, j’ai un ami dijonnais qui étudie avec moi à Aix, je l’appelle et il accepte gentiment de nous héberger. » Le pain noir d’entrée… La suite du périple se passe sans encombre avec beaucoup de hauts et aussi quelques bas. « J’ai découvert des villes et fait des rencontres exceptionnelles. Je vais garder contact avec certains de mes hôtes. Ça m’a fait du bien de courir. Et puis cette aventure m’a permis de mieux comprendre ma maman et vice-versa. Je sens qu’elle est fière de moi… »
Les souvenirs s’empilent. « Un monsieur de 62 ans qui habite à Cannes est venu jusqu’à Arles pour faire la 11e étape avec moi. Il m’a beaucoup aidé parce que c’était un jour difficile, avec la fatigue accumulée. Pendant 9 jours, je me sentais très bien, avec 10 km par heure de moyenne. Mais lors du 10e, j’ai ressenti une douleur musculaire à une cuisse. Les deux dernières étapes ont alors été plus difficile, j’ai alterné course et marche. »
A quoi pense-t-on lorsqu’on court huit heures par jour ? « A tout ! Parfois on s’ennuie, quand le décor n’est pas terrible, mais sinon on est toujours occupé par quelque chose et on se pose des questions. ‘Où vais-je trouver de l’eau ? A quel endroit faire la prochaine pause ? Tiens, si je traverse cette rivière, est-ce que je suis toujours dans la Drôme ou en Ardèche ?’ »
Objectif 2026
Dylan vient de soutenir son mémoire de master 2 sciences pénales et prépare l’examen d’accès au Centre régional de formation professionnelle d’avocats (CRFPA). Ce cursus, il l’a dans la tête depuis l’âge de 7 ans quand il assisté à une plaidoirie aux assises de Randall Schwerdorffer, star du barreau de Besançon, et annoncé à sa maman « Je veux faire ça quand je serai grand ! » Une révélation...
Si tout va bien, notre Forrest Gump au grand cœur prêtera serment et deviendra avocat en 2026. Entretemps, il aura sans doute concrétisé d’autres projets sportifs, comme celui de rejoindre la Turquie à vélo en référence à la convention d’Istanbul luttant contre les violences faites aux femmes. Un sujet qui lui tient à cœur et sur lequel il a travaillé durant son master.
Christophe Bidal
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