En Franche-Comté, beaucoup de chorales sont orphelines de chefs. Et les jeunes qui se présentent pour prendre la relève sont peu nombreux. A 22 ans, Océanie Craveiro est l’une des rares à avoir suivi la formation proposée par Franche-Comté mission voix. Soit six week-ends à apprendre la conduite d’une chorale en s’exerçant avec un chœur-école de 27 personnes. «C’était très intense et très enrichissant. On apprend à transmettre la façon dont on veut qu’une chanson soit jouée. Je fais de la chorale depuis longtemps, mais c’est autre chose quand on dirige. Je ne pensais pas qu’on ressentait des émotions et que l’on percevait des choses aussi différentes. Et puis il y a une grande satisfaction lorsque ce que l’on veut entendre se produit». Une formation d’autant moins facile pour Océanie qu’elle est non-voyante, atteinte d’une maladie rare. «Tout le monde m’a aidée. Cela fait du bien de rencontrer des gens qui montrent l’envie d’intégrer une personne non-voyante. J’ai dû m’adapter, trouver mes propres gestes, résoudre des problèmes par moi-même – et parfois mes gestes les faisaient même réfléchir à leur pratique - mais cela m’a permis de me rendre compte qu’on peut se lancer quelles que soient ses difficultés. Ce n’est pas parce qu’on a un handicap qu’on doit s’interdire des choses».
A ceux qui seraient tentés de suivre cette voie, elle ajoute un ou deux conseils. «On m’a dit que celui qui veut diriger parfaitement ne dirigera jamais. C’est en pratiquant qu’on s’améliore. Mais au préalable, si on veut donner des consignes à des chanteurs, il faut savoir comment fonctionne sa voix et donc chanter».
L'aide précieuse
de Phlox
La musique est sa voie. Outre la chorale, elle pratique le piano depuis 15 ans. Elle a entendu parler de la formation de chef de chœur par son prof de chant, Jean-Michel Montornes, avec qui elle a travaillé sur des partitions classiques. «J’aime beaucoup la musique ancienne, mais pas seulement. J’aime tous les styles de chant en fait» rit-elle. La formation de chef de chœur est selon elle un très bon complément à ses études. Elle est actuellement en 3e année de licence de musicologie après avoir validé sa 2e année en tête de sa promo. Ce qui est loin d’avoir été évident, car même si elle se dit bien aidée par d’autres étudiants, les transcriptions des cours demandent temps et argent. «Avant de revenir à Besançon, je suis allée en fac à Paris et à Limoges mais ça s’est mal passé car les lieux ne sont pas complètement accessible. Quand je suis tombé sur la licence de musicologie à Besançon, j’ai su que c’était vraiment ce qu’il me fallait».
Et l’accessibilité à Besançon ? «C’est mieux mais pas parfait. Il y a quelques endroits bien adaptés comme le Frac, il y a 90 carrefours équipés de feux sonores, mais encore beaucoup de choses à faire. Le tram, par exemple, n’est pas très accessible pour moi. J’ai testé, j’étais coincée, l’espace est trop petit avec un chien».
Son chien c’est Phlox, un St-Pierre qu’elle est allée chercher au Québec en 2007 grâce à la fondation Mira-France. Et sur lequel elle ne tarit pas d’éloges, tant il l’aide à atténuer les difficultés de la vie de tous les jours et lui permet de mener à bien toutes ses activités (en plus de la musique et de la fac, elle s’implique avec sa mère dans l’expertise de l’accessibilité aux handicapés et fait partie du comité de rédaction de Handiactu). «Il est très intelligent, très calme, il mémorise les trajets très vite. Il vient avec moi partout, y compris à la fac. Et il est toujours prêt à bosser». Quant à diriger une chorale en situation réelle, elle aimerait le faire, «mais il faut que je puisse le caser dans mon emploi du temps».
S.P.
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