Tamara a trouvé sa voix. Son «bébé» qu’elle chouchoute quotidiennement, cet «organe vital, en plus de la tête et du coeur», elle l’a vraiment découvert à l’âge de 12 ans, après 6 années de cours de chant au Conservatoire du Pays de Montbéliard : «j’ai voulu arrêter et quand je l’ai annoncé à ma professeur, ma voix a commencé à changer et à ressembler à quelque chose», s’étonne-t-elle encore. Dès lors, elle se plonge davantage dans les partitions et commence à y trouver un réel plaisir. Aujourd’hui, Tamara sait à qui elle doit cette passion devenue envie de métier.
«Au début, je n’avais pas du tout l’optique d’être chanteuse, j’aimais chanter, mais c’était plutôt un loisir, je n’avais pas vraiment envie de travailler. Si je n’avais pas eu Claudine (Bunod, sa professeur de chant), je n’aurais pas continué. Avec elle, je me sens libre, elle a toujours été très positive, m’a encouragée et m’a laissée faire mes choix au niveau du répertoire».
Adolescente, fascinée par l’air de la Reine de la nuit (dans «la Flûte enchantée» de Mozart) qu’elle écoutait en boucle, elle s’est donné ce défi : «Je voulais essayer de «sortir» cette note et j’ai réussi. A force de travail, ça m’a fait plaisir de savoir que j’étais capable de chanter un air d’opéra».
Même si la jeune fille a été bercée par les grandes voix qu’écoutait sa mère (de Carmen de Bizet à la chanson française), elle n’a pas côtoyé pour autant l’univers du lyrisme. C’est un monde qu’elle a découvert au fur et à mesure de ses années passées au Conservatoire, et surtout en 2011, à 16 ans, lorsqu’elle a participé à son premier opéra.
«J’ai adoré. Les costumes, la mise en scène, le choeur, l’orchestre… j’ai découvert le travail complet que cela représentait» se souvient-elle. Au-delà des coulisses, elle apprécie réellement de chanter sur scène. «J’adore les rôles et la multitude d’interprétations possibles. J’aime les nuances. Et dans l’opéra, il y a tellement d’univers». Surtout, à force de travail et de concerts, elle se rend compte que sa voix plaît aux publics, ce qui décuple son amour de la scène.
«L’opéra, ce n’est pas toujours
ce que l’on croit»
«Fun, drôle, complètement dingue». La jeune Montbéliardaise ne manque pas de qualificatifs pour définir l’univers du lyrisme qu’elle sait «très méconnu» des jeunes.
«C’est parfois élitiste, c’est vrai, les places d’opéra sont chères, mais de nombreux chanteurs contribuent à la démocratisation du genre. L’opéra, ce n’est pas toujours ce que l’on croit, avec le cliché de la forte chanteuse italienne. Je reviens de Bâle où j’ai vu «Daphné» de Strauss, la mise en scène était complètement actuelle, presque comme un film avec de supers effets spéciaux», raconte-t-elle. En terme de modernité, Tamara s’y connaît aussi. Elle a tourné en Italie avec une oeuvre contemporaine du compositeur Jacopo Baboni-Schilingi, professeur au Conservatoire de Montbéliard et intervenant à l’université d’Harvard. Dans la pièce «Concubia nocte», ellea partagé l’affiche avec une mezzo. Leurs voix sont mêlées à des musiques électroniques par le biais de différentes techniques (informatique, micros, vibrations, sifflements…). Au départ, elle avoue ne pas avoir été «totalement emballée», mais «cette oeuvre poignante» que le compositeur a écrit suite au décès de son maître, Luciano Berlio, l’a imprégnée totalement. D’autant plus que cette aventure l’a menée en Chine pour deux concerts. «Les Chinois sont très réceptifs à la musique classique, mais les différences culturelles créent des situations très particulières : ils semblent ne pas montrer d’intérêt, applaudissent brièvement, consultent leurs téléphones et dorment parfois. Mais à la fin du concert, il y a de vrais échanges avec le public et même des files d’attentes pour les séances d’autographe. Il n’y a pas un telle effervescence en France», déclare la jeune chanteuse.
«Chanteuse lyrique,
ce n’est pas un métier sûr»
Après avoir décroché le DEM (Diplôme d’études musicales) avec les félicitations, Tamara souhaite intégrer, l’année scolaire prochaine, un Conservatoire supérieur à Paris ou à Lyon. En parallèle, elle «cherche aussi à avoir de l’expérience et à faire le plus de concerts possibles, dans l’idéal des récitals et des opéras». Attachée au château de Montbéliard et aux murs du conservatoire, elle sait malgré tout qu’elle devra les quitter, «pour la carrière».
«Je ne peux pas me former ici comme je le voudrais malgré les profs «excellentissimes». Dans les grandes villes, il y a beaucoup plus d’auditions et d’opportunités. Je sais ce que je veux, je connais mes points faibles et mes points forts. Chanteuse lyrique, ce n’est pas un métier sûr et il faut se battre pour être accepté dans des écoles».
Simon Daval
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