Depuis que sa sclérose en plaques a été diagnostiquée, lorsqu’elle avait 20 ans, Marine Saugeon a tout entendu. Du maladroit, de l’idiot, du révoltant. Un jour, c’est une connaissance qui s’étonne en soirée qu’elle «ait l’air d’aller bien» et ne paraisse pas si fatiguée. Une autre fois, c’est la surprise qu’elle «n’ait pas de plaques» ! Et il y a les regards, les remarques désobligeantes, voire les insultes lorsqu’elle se gare sur les places réservées aux handicapés. «Je ne vais quand même pas faire semblant de boîter pour ne pas être jugée !».
Victime de la maladie, elle l’est aussi de la méconnaissance et de l’invisible. Extérieurement, aucun signe tangible chez cette jeune femme souriante et volontaire. «Il y a beaucoup de discrimination par rapport au handicap invisible. Quand on me croise, on ne s’imagine pas tout ce que cela représente. Là, je viens de passer 6 h à l’hôpital pour des examens et perfusions. Il y a la sclérose en plaques mais aussi des pathologies annexes qui en découlent, des douleurs neuropathiques». Selon les périodes, cela se traduit par des troubles moteurs, tremblements, douleurs diverses, fatigue, troubles sensitifs et cognitifs. A d’autres moments, elle peut se rendre aux Eurockéennes sans répercussion négative. «Et puis, on peut être debout, souriante, dynamique alors qu’à l’intérieur, ça va mal… Comme j’ai une bonne résistance à la douleur, à une époque, j’ai beaucoup caché, notamment vis-à-vis des employeurs, mais j’ai arrêté».
100 000 personnes affectées
en France
Mais ce combat contre la maladie ne suffit pas. Elle a également décidé de lutter en informant et en sensibilisant le public. Elle s’implique dans la fondation Arsep (1) dont elle est aujourd’hui déléguée départementale. «C’est né d’une déception et d’une colère. J’ai souhaité intégrer la fondation lorsque je me suis aperçue que lors de la journée mondiale de la SEP (le 30 mai cette année), aucun événement n’était prévu au niveau local, les médias ne relayaient pas l’information. Les gens continuent de rester dans l’ignorance sur cette pathologie imprévisible qui est la première cause de handicap non traumatique chez l’adulte jeune et qui affecte plus de 100 000 personnes en France avec 5000 nouveaux cas chaque années».
Cette année, elle s’est lancé un défi : un tour d’Europe en camping-car qui partira de Besançon pour aller jusqu’à la pointe sud de l’Espagne et au cercle polaire arctique, soit environ 20 000 km en semi-autonomie, avec une amie. Départ prévu au premier trimestre 2019. «L’idée est de sensibiliser l’opinion publique à travers de courtes vidéos pendant le voyage, en montrant les bons et les mauvais moments, en essayant de garder mon humour. C’est aussi un défi sportif puisqu’il y aura des randonnées pédestres et cyclistes». Il s’agit également d’ une récolte de Fonds au profit de l’Arsep (1) sur la base d’1€ pour 10 km.
Deux mois pour s'entraîner
Mais rien n’est simple. Auparavant, pour ne rien laisser au hasard, elle part bientôt pour 2 mois dans les pays latins, accompagnée de Patricia, une de ses amies. «Une sorte d’entraînement physique en conditions réelles pour voir comment ça va se passer, comment je vais gérer dans un autre environnement. Mais déjà là, c’est une grosse préparation. Je vais devoir faire ma rééducation seule alors que j’ai 2 séances par semaine avec un professionnel. Je vais emmener mes traitements et du petit matériel médical. Et puis, il y a le phénomène d’Uhthoff, augmentation de certains symptômes à cause de la chaleur. Mais j’aurai le soutien de Patricia et je serai suivie en visioconférence par François Ziegler, neurologue à la clinique de Lure».
Aussi est-il étonnant de l’entendre dire que depuis qu’elle est malade, elle a du mal à quitter sa zone de sécurité. Quitte à le répéter, tout est compliqué. «On part vers le sud, mais en évitant la période de grosses chaleurs. D’un autre côté, je suis plus attirée par les pays latins, le froid ne me fait pas du bien. Et l’ensoleillement est très important pour le moral. D’ailleurs la sclérose en plaques est moins présente dans les pays à fort ensoleillement».
Pour le moral, elle emmène aussi Jessy, son chien, mélange de golden husky, bouvier de 5 ans. «Je ne voulais pas de chien, en tout cas ce n’était pas le moment, mais c’est lui qui m’a choisie. J’étais chez une amie qui avait des chiots, il est venu et revenu vers moi, il m’a apaisée, alors je l’ai gardé. On ne se quitte plus, il est exceptionnel».
Stéphane Paris
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