C'est un atelier peu banal qui a vu le jour cet été du côté de Grand’Combe-Châteleu, à deux pas de la frontière suisse. Il est l'initiative de Manon Béliard, qui propose de la reliure d’art et classique ainsi que de la création originale. « La reliure, c’est la technique utilisée pour construire toute l’ossature d’un livre après l’impression des pages. C’est la colonne vertébrale d’un ouvrage ». Cette jeune doubienne a étudié pendant trois ans les arts appliqués au lycée Louis Pasteur de Besançon.
Métier d'art reliure dorure
A l’obtention de son bac en 2016, rien ne la destine à rejoindre la reliure. « En terminale, je voulais faire de la photographie. J'avais préparé des dossiers pour candidater à certains BTS ». Sur conseils de ses professeurs de lycée, la jeune étudiante se rend tout de même à Paris le temps d’un week-end afin d’assister aux portes ouvertes des quatre écoles d’arts publiques de la capitale. Presque par hasard, la visite de l'école Estienne la conduit dans un atelier de reliure. « En sortant du bâtiment je me suis dit : ça me plaît bien, je vais faire ça finalement ». Direction Paris pour y préparer un diplôme des métiers d’art reliure dorure. Diplômée en 2018, elle poursuit sa formation sur le terrain pendant une année auprès de professionnels de la reliure et des métiers du livre.
Après un an à sillonner la France, la jeune relieuse souhaite ouvrir son propre atelier. « Quand ? Comment ? Je n’en savais rien ». Une fois de plus, la décision est guidée par le hasard. « Dans le village de mes parents, un ancien artisan animait un club de reliure. Je me suis demandé si je pouvais utiliser le matériel. C’est comme ça que le projet est né ». En revenant à Grand’Combe-Châteleu, d’où elle est originaire, Manon découvre un lieu idéal pour installer son atelier. Il s’agit de l’ancienne ferme comtoise située à côté de la maison où sont entreposées les machines du club de reliure. « Cette ferme était à vendre. J’ai appelé cet endroit L'atelier 1773 car c’est l’année de la construction de la bâtisse ».
Stages d'initiation
Lancer son activité dans la commune de Grand’Combe-Châteleu est également tout un symbole. « Je trouve que ça fait sens de le faire dans ce village parce que c’est celui où il y a le plus d'artisans d'arts dans le val de Morteau. Ces maisons anciennes perdent leurs charmes quand elles sont transformées en locatif. De plus, mon atelier est ouvert au public, donc dans une certaine mesure, ça permet de faire vivre le lieu ».
Si quelques machines étaient déjà présentes à Grand’Combe-Châteleu, quelques mois ont été nécessaires pour rassembler tout ce dont la relieuse avait besoin. « Cela ne s’achète pas en neuf. Personne n’en construit aujourd’hui, ce qui existe date du XXe siècle. Il faut donc faire marcher son réseau ou fouiller sur des sites de vente d’occasion. Les machines sont très solides, c’est du bois brut et de la fonte. En général, elles se passent de relieur en relieur ».
La reliure reste un métier de niche, Manon en est bien consciente. « Souvent on voit un relieur comme un vieux monsieur barbu dans son atelier, alors que la profession est majoritairement féminine ! ». Aussi, dès la création de son entreprise, elle cherche à se diversifier. Son atelier propose, en plus des reliures, des initiations. « Ça change du traditionnel cours de cuisine, et les participants peuvent vite apprendre les bases de la papeterie ». La proximité avec la frontière aide également le développement de l’atelier. « Ici, le pouvoir d’achat est plus haut que dans le reste du pays grâce aux frontaliers ».
Après avoir quitté le Doubs pour ses études à Paris, puis être passée par Grenoble, Uzès ou encore Forcalquier, la boucle semble bouclée pour Manon. « Si vous m’aviez dit au lycée que j’allais venir m’installer à Grand’Combe-Châteleu, je ne vous aurais jamais cru. Mais en revenant après mes différentes expériences, on se dit qu’on est quand même pas si mal ici ».
Benjamin Bugnet
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