C'est quoi ton expérience de la scène ?
A Dijon on a fait pas mal d'événements, en commençant par des événements sauvages il y a trois ans. Puis on est entré en contact avec la Vapeur qui a commencé à accompagner le projet. Ça nous a permis de faire les Inouïs du Printemps de Bourges ; à cette époque j'ai sorti mon 2e album
Who's bad qui donné lieu à une release party à la Vapeur suivie de quelques dates. Dont les premières parties de Luv Resval, Ziak et Koba la D.
Comment tu définirais l'approche musicale de ton dernier projet ?
Ma musique évolue vers une forme plus dansante, plus « next generation » (des artistes comme Luther, Winterzukko, So La Lune...). C'est une époque de liberté, où on se permet de casser les codes. Le rap se diversifie et peut fusionner avec toutes sortes de musique. Par exemple, j'y implémente du rap à l'ancienne, à l'image des énormes influences qu'ont été Booba et Sniper pour ma musique. Tout cette nouvelle vague est rendue possible par le fait que les techniques de production sont de plus en plus accessibles aujourd'hui. Je me reconnais dans ce mouvement où la création côtoie l'innovation.
De quoi parle ton rap ?
Il parle de mon expérience, de ce que je vis, de mes proches. En grandissant, j'ai appris à avoir un regard plus posé sur les choses, à nuancer mes propos. Dans
Illégale Tape 2 j'arrive plus à exprimer les choses simplement et je trouve que ça va de pair avec l’idée de grandir, de gagner en maturation.
Comment te positionnes-tu dans ce marché florissant où la concurrence est de mise ?
Aujourd'hui, on est dans une époque enrichissante, il y a de plus en plus de rappeurs et de producteurs. En tant qu'auditeur, c'est génial, je trouve de plus en plus de projets qui correspondent à mes goûts. Et en tant que rappeur, ça peut m'inspirer. Ce côté compétition me donne envie de me dépasser, d'aller plus loin. Il ne remet pas mon talent en question, mais le nourrit. L'idée qu'ils puisse y avoir une industrie du rap, comme celle qu'on a aujourd'hui, me rebute un peu. Je suis contre l'idée que les chiffres puissent passer avant la qualité. Mais d'un autre côté, mon objectif c'est quand même d'en faire mon métier. Alors je me mets à la page, j’essaie de faire connaître ma musique au maximum, je remets en question ma musique et l'univers que j'apporte, je m'informe sur les tendances, j'investis financièrement sur le projet.
Comment traites-tu les visuels de ta musique ?
De nos jours c'est hyper important. Je trouve que c'est un des points où j'évolue encore, d'autant plus que le niveau de la direction artistique et visuelle des autres rappeurs est de plus en plus impressionnant. Mais après je suis conscient que ces projets sont développés par des grosses équipes. De mon côté, j'essaie de m'entourer le plus possible.
Comment vis-tu le passage du studio d'enregistrement à la scène ?
Je trouve que mes morceaux sont plus « impactants » sur scène qu'au studio. A chaque fin de scène, c'est toujours un plaisir de voir les nouveaux convertis. Ma production musicale ne tire pas dans l'extravagance pour tirer dans l'extravagance. Je veux que mes instrus me plaisent et c'est avec mes paroles, mon vécu que je me différencie. Notre époque demande surtout aux artistes d'être authentiques. Aussi, je trouve que le niveau global des concerts de rap n'est pas au point, car les artistes représentés sont souvent des rappeurs-studio. A l'inverse, l'énergie qu'on peut mettre sur scène nous différencie et nous différenciera encore plus à l'avenir.
Tu es à quel moment de ta carrière ?
Je suis sûrement dans le meilleur moment de ma carrière, je me sens stimulé, « challengé », j'ai encore tout à prouver. Je pense même que plus tu travailles, plus tu connais d'échecs, plus tu arriveras à rester toi-même face au succès. Après les concerts, je retourne faire de la cuisine au bar. Mais pour moi, c'est déjà une réussite en soi de pouvoir performer en live, m'exprimer au studio, d'avoir des gens qui m'écoutent... Je prends toujours le bus pour aller à la Vapeur mais une fois que j'y suis, je vois 1200 personnes dans la salle prêtes à danser et je ne connais rien de plus encourageant. J'aime ce que je fais, ça m'épanouit, je ne me vois pas arrêter, que ça marche ou pas.
Quelle est la différence entre rappeur et artiste ?
Pour moi l'artiste a une vision plus globale de son projet, il est touche-à-tout et ne se limite pas qu'à la musique. Aujourd'hui je suis rappeur mais pas uniquement : je fais ma communication, mon mailing, ma direction artistique. Aujourd'hui avec mon travail dans la restauration, où je peux faire du 39 à 50 h par semaine, je dois m'accrocher pour garder le rythme. Je suis rappeur indépendant même si j'ai un entourage qui m'aide beaucoup. Dans mon dernier projet,
Illégale tape 2,
Le Maltek a fait le mixage et le mastering. Grâce à lui, ma charge de travail s'est allégée, j'ai pris plus de hauteur sur mon projet. Quand je dis que mon objectif est de vivre avec la musique, c'est de pouvoir avoir le temps d'avoir un œil créatif sur la globalité de mon projet. J'adore monter des clips sur Adobe, j'adore designer des vêtements, le tatouage est aussi une activité qui compte. Je préfère être un artiste polyvalent qui fait du rap que d'être limité à l'étiquette de rappeur. Mais après pour arriver à avoir ce temps nécessaire il faut être confortable au niveau de ses finances. Il faut des conditions favorables à l'émergence d'un univers artistique : ça peut être une équipe ou encore des moyens... Je n'ai rien contre les rappeurs grand public qui appliquent une recette mais je ne me sens pas appartenir à leur catégorie. Je veux une carrière durable.
Si tu devais définir l'avenir de ton projet musical en 3 mots ?
Persévérance, créativité et énergie.
Recueilli par Nasser Ferchichi
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