Poltergeist n’est pas de ceux qui font table rase du passé. Au contraire, il s’en nourrit pour construire un univers dont la notoriété grandit ces derniers temps. Son cursus musical, entamé dès 6 ans au conservatoire de Chalon-sur-Saône lui a donné une culture plutôt étendue.
« J’étais en classe à horaires aménagés. J’ai fait du violon pendant 9 ans puis j’ai lâché pour aller en guitare jazz pendant 2 ans. En paralllèle, en cursus musiques actuelles, j’ai travaillé sur le son, la production musicale, j’ai découvert les logiciels, les synthés, plein de manières de faire du son ».
Même perspective côté écoute, oreilles grandes ouvertes. Ce n’est pas parce qu’on a 20 ans qu’on ne peut pas apprécier Arno.
« Il y a quelques temps, j’écoutais ça et plein de groupes français comme les Rita Mitsouko, Noir Désir, Louise Attaque… ». Etape suivante marquante, avec la découverte de Prodigy, puis rewind : le krautrock et le postpunk, qu’il soit new wave ou cold wave, l’electro. Sur Bandcamp, sa présentation
« convie Joy Division, New Order, Talking Heads, The Cure, Can, Kraftwerk, Nine Inch Nails ou Jeff Mills (…) et l’épicentre, Berlin. »
Noire est la couleur
Il en découle un univers personnel electro voire techno, baignant dans une ambiance sombre, des rythmes lents (
23 : 23) et roboratifs (
La Grande Dame) nappés de synthés, même de guitares (
Dark Wave) qui posent une ambiance envoûtante et fataliste. Les mots choisis correspondent :
Die Schwarze Muse (la muse noire),
der Nachtvogel (l’oiseau de nuit),
Angst Vor Dem Bösen (peur du mal),
All this to death,
Dark Wave, Black Sheep.
Aujourd’hui, on s’aperçoit que de nombreux projets sont nés pendant le confinement, qui aura au moins été propice aux réflexions personnelles. C’est le cas de Poltergeist, du nom de l’esprit frappeur du film de Tobe Hooper, reflet d’un intérêt pour le paranormal.
« J'ai vraiment mis en place l'idée lors du premier confinement. Auparavant, j’avais un autre projet musical, plus teinté pop. Mais là, j’ai pu essayer d’autres choses et élaborer cette esthétique plus electro et sombre en pensant pouvoir la développer. Ça m’a donné encore plus envie de me lancer ».
Les textes, souvent parlés, privilégient l’allemand (anglais et français sont aussi au programme) alors que le jeune homme ne pratique pas la langue. C’est intentionnel comme le noir qu’il porte sur scène.
« Entendre Kompromat a été un déclic car ils utilisaient la langue allemande et des sonorités qui me plaisaient. En allemand, ce n’est pas facile, mais c’est une référence à une culture musicale que j’aime, notamment l’esthétique indus minimaliste ».
Sur le label de Vitalic
Sur ces bases, le nom Poltergeist a rapidement tourné. Six mois après s’être lancé, il gagne direct le tremplin Novosonic pour son premier live, qui lance sa réputation et lui montre
« que ça peut marcher ». Sélectionné aux Inouïs du Printemps de Bourges puis repéré aux Transmusicales de Rennes, il complète ce parcours d’un EP et d’un double single qui lui permettent d’atterrir sur
Clivage Music, le label de Vitalic. Comme une boucle :
« Kompromat, c’est Vitalic et Rebeka Warrior. Il se trouve qu’en 2021, j’ai fait la première partie de Mansfield.TYA, dont Rebeka Warrior est la chanteuse. Et là, je me retrouve sur le même label que Kompromat… »
Depuis le départ, le jeune artiste construit son univers avec l’aide de Lou, sa sœur et Adrien, manager, qui l’appuient dans son développement et ses concerts avec leur agence LaMif (1). Les deux chalonnais font partie intégrante du projet, auquel ils apportent leurs compétences en com, merch, diffusion et appuis divers. Car si son projet est personnel, le jeune homme aime s’entourer. En live, il peaufine des sets qui divergent de ses compos enregistrées, aussi est-il important pour lui d’être bien accompagné.
« Le live, c’est de la création permanente, avec des morceaux recomposés, arrangés différemment. Ça prend beaucoup de temps ».
L’an dernier, Poltergeist a encore pris de l’ampleur avec la publication d’un album,
Kämpfer, et une tournée avec Vitalic et des dates affichant complet.
« Cela permet de faire découvrir le projet au public, en espérant qu’une partie reste fidèle… » Il a également intégré l’
Opération Iceberg, dispositif franco-suisse d’accompagnement.
« C’est pointu, d’un très haut niveau. J’ai passé des super moments à travailler avec des musiciens et notamment Pierre-Antoine Grison alias Krazy Baldhead. Il aime transmettre son savoir, explique simplement ses techniques informatiques notamment avec Ableton. C’est quand même quelqu’un qui était au début d’Ed Banger » dit le jeune homme en évoquant le label parisien, référence de l’electro côté french touch. Encore un signe de sa volonté de se nourrir de l’histoire musicale pour construire la sienne.
Stéphane Paris
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